Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 19.djvu/455

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à cette vaste exploration, qui semble vouloir reculer les bornes du monde, en même temps qu’elle reconstruit la topographie antique de l’Egypte avec Mariette-Bey et la géographie de la Gaule avec M. Ernest Desjardins.


III.

Quand Paris travaille, la province prend courage, et depuis 1871 elle a taillé, comme on dit, de bonne besogne. Des sociétés nouvelles se sont établies dans le Poitou, la Saintonge, le Lyonnais, la Normandie ; les anciennes ont ouvert des concours. Quelques conseils municipaux, celui de Bordeaux entre autres, ont voté des fonds pour la publication des documens inédits relatifs aux villes qu’ils administrent, et nous n’exagérons pas en portant à plus de 200 le nombre des volumes qu’elles ont ajoutés depuis cinq ans à la collection de leurs mémoires. Les études individuelles n’ont été ni moins importantes ni moins nombreuses, et nous pouvons demander à n’importe quel département ce qu’il a produit ; nous y trouverons toujours un groupe dévoué de travailleurs et quelque œuvre de sagace et solide érudition récemment parue. À Lyon, nous rencontrerons MM. Guigue et de Villeneuve ; dans les Basses-Pyrénées, M. Raymond ; à Angers, M. Célestin Port, qui nous fournit sur Maine-et-Loire une telle masse de renseignemens que nous ne savons ce qu’il faut le plus louer de sa patience ou de son savoir ; dans le Dauphiné, M. L’abbé Chevallier ; dans l’Yonne, M. Quantin ; à Blois, M. Dupré ; dans le Morbihan, M. Rozenweig ; dans le Tarn, M. Jolibois ; à Tours, M. Grandmaison ; à Troyes, M. Astier ; à Laon, M. Fleury ; à Lille, M. Coussemaker ; à Boulogne-sur-Mer, MM. Morand et Tamisey de La Roque ; à Amiens, M. Darcy ; à Abbeville, M. Prarond ; enfin nous en rencontrons un si grand nombre partout, à Bordeaux, à Marseille, à Toulouse, que nous nous excusons de ne pouvoir les citer, en les priant de se souvenir que chaque département compte au moins une vingtaine de travailleurs, historiens, numismates, archéologues, et que pour nous acquitter envers tous comme ils le méritent, nous n’aurions guère moins de seize ou dix-huit cents noms à mentionner.

Le nombre des travailleurs se double, et leurs œuvres gagnent en clairvoyance, en solidité, elles embrassent de plus larges horizons. Les archéologues ne s’attardent plus, comme il y a trente ans à peine, à des tessons informes de potiches romaines ; ils ne prennent plus la nef dès fous qui figure sur les églises du XVe siècle pour un navire du temps des croisades, où les marins révoltés battent la femme du capitaine, et le verset de l’Apocalypse : Gladii de ore domini