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Dans ce chiffre de l’impôt personnel et foncier la noblesse n’entre que pour ses propriétés urbaines, maintenant soumises à l’impôt. Aujourd’hui comme avant l’émancipation, la grande propriété ne fournit directement à l’état aucun subside. Elle ne supporte que des contributions locales pour la province ou le district, et de plus une taxe spéciale mise sur les terres de la noblesse et destinée au petit budget de cet ordre de l’état. Cette franchise de l’impôt direct, en partie justifiée par les embarras infligés aux propriétaires lors de l’émancipation, n’est plus entière aujourd’hui. La grande propriété a été indirectement atteinte par le fisc au moyen d’un fonds de concours prélevé par le trésor sur les revenus provinciaux ou municipaux. Ce fonds de concours auquel contribuaient toutes les classes de la population, s’est élevé jusqu’à 29 millions de roubles en 1871, pour descendre à 24 millions en 1874. Une grande partie de ce revenu était fournie par les biens fonds, et de ce côté la grande propriété semble avoir été plus taxée que les terres de paysans. Le mode de répartition varie beaucoup du reste suivant les régions. Dans certaines provinces, dans quelques districts des gouvernemens de Tambof et de Novgorod par exemple, le fonds de concours et les taxes locales auraient absorbé jusqu’à 20 ou 25 pour 100 du revenu net de la grande propriété[1]. L’on voit que malgré leur franchise légale, les terres de la noblesse sont, en fait, loin d’être exemptes de toute contribution. La moyenne des charges incombant à la grande propriété ne paraît pas cependant supérieure à 5 pour 100 du revenu. C’est dire combien l’établissement d’un impôt foncier normal, à l’aide d’un cadastre régulier, pourrait faire cesser d’anomalies et combien profiter à l’état. De toutes les branches du revenu public le fonds de concours était celle qui présentait le plus de variations, de fluctuations dans les rentrées. Aussi a-t-on en 1875 procédé a la fusion de la contribution provinciale avec les autres ressources du trésor. Le fonds de concours réduit

  1. Économiste français, juin 1874. En s’appuyant sur de tels exemples, certains écrivains russes ont représenté la noblesse comme ayant souvent plus à se plaindre de l’impôt que les paysans. Je citerai entre autres l’auteur anonyme de Molodaïa Rossia (Stuttgardt 1874), p. 22-24. — L’assiette de l’impôt varie tant, suivant les régions dans les mêmes classes, qu’en prenant des exemples particuliers, il semble qu’on puisse arriver pour deux districts parfois voisins aux résultats les plus contradictoires.