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et cette appellation n’est généralement usitée que dans les ordres dont la composition est relativement aristocratique. L’éducation qu’elles ont reçue leur permet de s’assimiler rapidement les quelques notions médicales qui sont nécessaires pour former une garde-malade intelligente. Parfois même elles s’aventurent trop loin, et l’on est obligé de mettre un frein à leurs hardiesses médicales. Par contre, elles exigent davantage des infirmières qui sont sous leurs ordres, et se renferment plus exclusivement dans ces attributions de surveillance que je me suis efforcé de définir. Ce sont les qualités et les imperfections inverses que l’on rencontre chez les sœurs de Saint-Vincent de Paul qui ont la charge de l’hôpital Sainte-Eugénie. Bien que cet ordre soit assez nombreux pour être obligé de se recruter dans toutes les classes de la société, et que sous les larges ailes de la cornette blanche se cache plus d’une femme portant un nom illustre, cependant, comme il est aussi le plus connu et le plus populaire de tous, il admet dans son sein beaucoup de jeunes filles qui sortent des rangs les plus humbles. Peut-être aussi les sœurs de Saint-Vincent de Paul, qui sont consacrées au service des hôpitaux, n’appartiennent-elles pas à l’élite sociale et intellectuelle de cette communauté, qui conserve ses sujets les plus lettrés pour les écoles et les pensionnats, ou la direction de leurs nombreux établissemens. Aussi sont-elles généralement inférieures aux sœurs de Saint-Thomas de Villeneuve sous le rapport des connaissances générales qui constituent une garde-malade accomplie. En revanche, elles sont de plus rudes travailleuses et soulagent les infirmières d’une partie de leur tâche. Il suffit de comparer le tablier d’une sœur de Saint-Vincent et celui d’une mère de Saint-Thomas pour voir qu’elles ne font pas la même besogne. Mais qu’importe par qui la besogne est faite, pourvu qu’elle soit bien et régulièrement faite ? À ce point de vue, le service des sœurs dans les hôpitaux d’enfans, et l’on peut ajouter dans tous les hôpitaux de Paris, s’accomplit avec une ponctualité qui ne laisse rien à désirer. Interrogez sur ce point les directeurs, aussi bien placés que les médecins pour en juger, et qui se tiennent plus volontiers en dehors des querelles des partis. Quelques-uns se plaindront peut-être de certaines difficultés de gouvernement intérieur, d’une tendance fréquente à ne pas reconnaître leur autorité et à ne s’incliner que devant celle de la supérieure ; mais tous seront unanimes à proclamer la parfaite régularité d’un service qui marche de lui seul en quelque sorte et sans surveillance, en vertu d’une impulsion une fois donnée, ou plutôt comme si une main invisible en remontait mystérieusement les ressorts.

Quant à ces faits de prosélytisme outré qu’on leur reproche, quant à cette partialité qu’elles témoigneraient en faveur des malades qui