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surveillance, de président, etc. Cela fait, deux des amis et camarades, MM. Leloup et Renard, fondent une société qu’ils nomment la société le Vulcain, et passent devant notaire l’acte, où ils indiquent, en termes aussi vagues que possible, que l’objet de l’entreprise est l’acquisition d’une fabrique de machines. Le même jour, Leloup et Renard achètent à Dupont la fabrique de Durand au prix de 1 million de thaler. Au préalable, ils ont fixé dans le statut le taux du capital par actions à 1,200,000 thaler. L’excédant, soit 200,000 thaler, sera employé comme « capital d’exploitation, » afin de donner une impulsion vigoureuse aux travaux de la fabrique. Le même jour, devant le même notaire, se tient l’assemblée générale de la société le Vulcain. Sont présens Dupont, Leloup, Renard, plus MM. Lajoie, Fortuné, Lenoir et Leblanc, en tout sept personnes. Ce sont les premiers actionnaires du Vulcain : ils apportent le capital de 1,200,000 thaler, sur le papier, bien entendu, car jusqu’à présent il n’a pas été remué un rouge liard par qui que ce soit. Sans désemparer, les sept actionnaires approuvent l’acquisition de la fabrique, faite par Dupont au prix de i million de thaler : la résolution est prise à l’unanimité ; s’il y a quelques objections, elles sont modérées et de peu d’importance. On nomme ensuite le conseil de surveillance, qui, d’après la loi, doit se composer de trois personnes : à une forte majorité, Lajoie et Fortuné sont nommés membres, et Leloup président. Une majorité plus imposante nomme Dupont directeur de la société le Vulcain, et Renard sous-directeur. Les cinq dignitaires prennent place alors, chacun selon le rang qui lui convient, autour du tapis vert. Sur les bancs des actionnaires, Leblanc et Lenoir restent assis modestement. Le notaire a tout observé, il a donné ses conseils de jurisconsulte ; il atteste que les délibérations et les élections ont été faites selon la teneur des lois.

L’affaire est alors portée à la maison de banque des frères Israël, qui l’attendaient, ayant été consultés d’avance, mais qui s’étaient, comme de raison, tenus à l’écart de toutes les négociations. Les frères Israël font l’avance des 10 pour 100 du capital de fondation, qui, pour obéir à la loi, doivent être versés, et voilà les actions de la société le Vulcain portées à la cote. Quelques semaines après, elles atteignent ou dépassent le pair : l’argent a donc été fourni par le public. Alors se fait le partage. Les frères Israël prélèvent, comme il est juste, leur petite commission, qui est de 16 2/3 pour 100, soit 200,000 thaler, et ils comptent 1 million à Dupont, directeur du Vulcain. Lenoir et Leblanc, braves gens sans conséquence et qui n’ont d’ailleurs souscrit qu’une faible somme, reçoivent chacun 10,000 thaler. On ne peut donner moins de 40,000 thaler à partager