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entraves à l’action. Enfin tout ce personnel, né du nombre exagéré de nos arsenaux et de l’excès de contrôle, coûte-fort cher, car tout se paie en ce monde, le luxe comme la défiance.

Prenons garde de nous enfoncer de plus en plus dans cette voie et de consacrer par entraînement, des sommes tellement fortes à entretenir tous les élémens d’une marine immense, qu’il ne reste plus rien pour la marine elle-même, pour faire des vaisseaux et des hommes capables de les conduire à l’ennemi. Nous avons bien près de nous un exemple qui doit nous donner à réfléchir. De la grandeur maritime de l’Espagne, il reste de gigantesques arsenaux, le Ferrol, la Carraque, Carthagène, mais l’herbe y pousse. La coquille est. magnifique; l’animal qui l’habitait est mort d’inanition.

Un pareil sort ne nous menace pas encore, mais nous n’en sommes pas moins sur la pente qui y conduit, et il est temps d’enrayer, si nous ne voulons pas que. le mouvement s’accélère.


IV.

Au mal intérieur qui ronge la marine, les remèdes seraient :

1° Réduction des cadres des officiers de marine,
2° Réduction du personnel sédentaire,
3° Réduction du nombre des établissemens,
4° Augmentation simultanée du budget.

Nous avons dit comment nous comprenions la rédaction des cadres des officiers de marine. Cette réduction devrait se faire par des retraites volontaires, sans économie présente pour l’état; l’économie viendrait plus tard, l’unique résultat à poursuivre aujourd’hui étant le rétablissement d’un mouvement d’avancement nécessaire. La réduction du personnel sédentaire et du nombre des établissemens serait plus compliquée. L’une et l’autre, demanderaient, pour être faites, équitablement, beaucoup de ménagemens vis-à-vis d’hommes qui, en entrant au service public, ont acquis des droits; ce ne pourrait être que l’œuvre de longues années de transition et de volonté ferme et soutenue. D’où cette volonté ferme et soutenue pourrait-elle venir? De l’administration centrale de la marine? Assurément elle renferme toute l’intelligence, toute l’expérience, tout le savoir-faire nécessaires, et l’autorité ne lui ferait pas défaut, car, depuis que la changement de gouvernement est devenu chez nous une maladie chronique, nos grandes administrations, seule organisation qui survive aux révolutions, puisent dans cette permanence une force qui s’accroît tous les jours. Mais pouvoir et vouloir sont deux choses, et il est probable que pour