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des résolutions qu’elle désapprouvait, mit le gouvernement en demeure d’apporter à l’économie des lois de finances, à la distribution des matières et à la date de leur présentation au parlement, des modifications qui fissent cesser un état de choses aussi regrettable.

L’année suivante, M. Gautier, de la Gironde, rapporteur du budget des dépenses pour 1837, tout en constatant l’accord qui existait entre les deux chambres et le gouvernement, et en concluant à l’adoption du projet du budget, crut devoir, pour maintenir le droit de la chambre, présenter quelques observations analogues à celles que le comte Roy avait formulées un an auparavant. Un orateur de l’opposition, M. le vicomte Dubouchage, s’empara de ces observations pour censurer amèrement le gouvernement, qu’il accusa de violer la charte et de détruire les prérogatives de la pairie par la négation de son droit d’amender le budget, et il mit en parallèle avec cette conduite celle de M. de Villèle, dont il rappela les déclarations.

Le ministre des finances, M. d’Argout, après avoir donné à la chambre des pairs les explications que nécessitaient certaines observations du rapporteur, crut devoir répondre également aux critiques de M. Dubouchage, parce que le gouvernement « considérait la dignité et l’indépendance de la chambre des pairs comme une des bases les plus essentielles de nos institutions. » Voici en quels termes explicites et formels il reconnut à la chambre haute le droit d’amender le budget :


« A la chambre des députés appartient la priorité du droit d’examiner les dépenses et de voter les impôts. C’est la charte qui le dit, et la commission en convient, ainsi que l’honorable préopinant. Maintenant le droit de discussion existe-t-il dans les deux chambres ? Je ne pense pas que personne ait jamais prétendu que la discussion de la chambre des pairs ne doit pas être aussi sérieuse, aussi solennelle que celle de la chambre des députés. Quant au droit de rejeter le budget, il est incontesté : on a fait seulement une observation, c’est qu’on ne devait en user que dans les cas d’une nécessité extrême et avec la plus grande circonspection. Le droit d’amendement? Mais ce droit, je demande par qui il a été contesté?

« M. le vicomte Dubouchage. — On l’a contesté dans la presse.

« M. le ministre des finances. — Ce n’est pas la première fois que ce sujet a été agité dans cette chambre. L’honorable membre a cité une déclaration de M. de Villèle; je pourrais citer à mon tour une déclaration de M. de Martignac. Oui, la chambre des pairs a le droit d’amender le budget. Maintenant doit-elle toujours user de ce droit pour des objets de médiocre importance? Voilà la question. Du moment où nous sommes d’accord sur le droit, il ne reste plus que la question de fait.