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envie de la contester, du moment que cette condition de tout gouvernement sage n’est point séparée des autres. Quant à la droite, c’est le principe même de sa politique et la raison qui lui a fait accepter une forme de gouvernement qui n’était pas la sienne. Donc, au point de vue des idées, nulle difficulté de s’entendre pour former une grande majorité dans le parlement. Que restera-t-il en dehors ? Une minorité composée des partis extrêmes qui n’ont pas voté la constitution et n’entendent pas la maintenir. Il y a le groupe peu nombreux des intransigeans de gauche, qui n’en parlent que comme d’une déception pour les vrais républicains, ménagée par l’habileté des uns et consentie par la faiblesse des autres. Quant au groupe très nombreux des radicaux opportunistes, il peut-être un sérieux embarras pour la situation parlementaire, s’il ne se désintéresse pas du pouvoir, comme les radicaux anglais, devant les républicains libéraux et conservateurs, les seuls que le pays voie en ce moment avec confiance au gouvernement. Il y a le groupe, moins nombreux encore, des intransigeans de droite, qui ne voient dans la constitution qu’une trahison de monarchistes passés à la république, ne semblant pas s’apercevoir que ce sont eux qui ont livré le sénat au parti républicain par leur défection dans l’élection des sénateurs à vie. Singulière fidélité à la cause monarchique qui, au lieu d’émigrer à l’étranger, garde au sénat un siège obtenu à quel prix ! pour en faire une place de guerre contre la constitution ! Avons-nous besoin de dire que nous ne comprenons point dans ce groupe les légitimistes restés fidèles tout à la fois à leur roi et à leur parti ? Il y a enfin le parti bonapartiste, faible au sénat, nombreux dans la chambre des députés, dont le jeu est de se servir de tous les partis auxquels il prête sa voix dans toutes les coalitions dirigées contre le gouvernement constitutionnel. Le jour où une majorité imposante viendrait se grouper autour de ce gouvernement, ce parti ne ferait guère meilleure figure dans les chambres qu’il ne l’a faite dans la dernière assemblée, avant nos divisions.

Reste la question des partis et des personnes. Ici, nous en convenons, la difficulté de s’entendre pour former enfin une majorité de gouvernement est plus grande que ne sauraient l’imaginer les esprits droits et sincères qui n’ont pas le secret des combinaisons et des intrigues parlementaires. Il faut avoir vu de près le jeu des partis, il faut y avoir été mêlé pour comprendre comment des hommes politiques peuvent être encore fort loin de s’entendre, quand ils sont, au fond, d’accord sur les principes de la politique à suivre. Combien de fois n’avons-nous pas cru, dans l’ancienne assemblée, qu’une situation vraiment nouvelle allait amener un nouveau classement des partis, ou du moins des groupes qui composent les partis ? Tout semblait facile, à ne considérer que les