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537 sur 14,211, soit une proportion de 3,77 pour 100. Enfin, dans son curieux ouvrage sur la Prostitution à Paris, M. Lecour relevait il y a quelques années 77 élèves des hospices sur 3,726 filles inscrites. D’un autre côté un mode de calcul, il est vrai très arbitraire et approximatif, donne la proportion de 1 détenu sur 348 enfans assistés, tandis que la moyenne est de 1 sur 693 pour le total de la population. Le même calcul donne une fille inscrite sur 366 enfans assistés, tandis que la proportion, pour la population agricole est de 1 sur 1,200. Il n’est pas étonnant que l’absence d’une véritable éducation de famille conduise un assez grand nombre d’enfans assistés au crime et à l’inconduite ; mais, si le mal existe, il ne faut cependant pas le grossir, ni faire aux élèves des hospices une réputation plus mauvaise qu’ils ne méritent.

En regard des pupilles de l’Assistance publique qui font cette triste fin, mettons tout de suite ceux qui, plus heureux, sont réclamés par leurs parens avant leur majorité. Le nombre des retraits s’est élevé en 1875 à 566, ce qui est à peu près le chiffre des années précédentes, sauf l’année 1872, où le chiffre des retraits s’est élevé à 783, à raison du grand nombre d’abandons effectués pendant le siège de Paris. L’Assistance publique a mis une certaine rigueur à poursuivre contre les parens le remboursement des frais occasionnés par les enfans retirés. Ces remboursemens se sont élevés en une année de la somme de 2,699 francs à celle de 24,804. L’administration, en exigeant ces remboursemens, ne poursuit pas seulement un bat d’économie ; elle veut aussi détruire cette idée encore trop répandue dans les classes inférieures que l’abandon d’un enfant équivaut à un placement gratuit et temporaire aux frais de l’état. Toutes les demandes de retrait ne sont point au reste accueillies par l’administration, et elle en rejette annuellement un certain nombre, les unes parce que la famille ne lui paraît pas présenter des garanties suffisantes de moralité, les autres parce qu’elles semblent surtout dictées par une pensée de lucre et de spéculation sur l’enfant. Lorsque l’enfant paraît très attaché à ses nourriciers, on remet parfois à sa décision l’option entre sa famille naturelle et sa famille adoptive. L’intention est humaine sans doute, mais n’est-ce pas soumettre à une épreuve trop cruelle l’âme débile d’un enfant, obligé de résoudre ainsi à lui seul un des plus redoutables problèmes qui puissent se poser devant une conscience humaine : le choix entre les devoirs de la reconnaissance et ceux de la famille ? Il ne faut pas croire en effet que la perspective de retourner auprès de leurs parens cause à tous ces enfans une joie égale. Visitant un jour l’hospice de la rue d’Enfer, j’aperçus dans un coin une jeune fille de douze ou treize ans qui pleurait silencieusement. Comme je lui demandais la cause de son chagrin, elle