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n’est pas moins concluant, c’est le témoignage de ceux qui ont vu de près l’ancien institut : que nous disent-ils ? Que ces fermes qui coûtaient si cher, en réalité ne servaient presqu’à rien : maîtres et élèves n’y allaient guère, ils n’en avaient pas le temps, absorbés par la théorie. Est-ce à dire qu’il faille créer une école sans un pouce de terrain où l’on puisse faire des démonstrations et des recherches ? Non, car ce serait priver l’enseignement d’un complément indispensable ; mais établir, comme autrefois, une exploitation sur une vaste échelle, serait imposer à l’état une lourde charge, sans profit sérieux pour l’instruction.

La loi de 1876 évite les deux solutions extrêmes : elle adjoint à l’institut un champ d’expériences, véritable laboratoire dont l’étendue ne pourra dépasser 50 hectares. Mais où en sera l’emplacement ? Cette question en appelait naturellement une autre : où sera établi le futur institut ? à Versailles, ainsi qu’autrefois ? L’ancien institut, on le sait, avait été installé dans les magnifiques bâtimens des écuries du roi. Aujourd’hui l’administration de la guerre les a ressaisis, et il serait pour le moins difficile d’obtenir qu’elle les abandonnât. Dès 1868, la commission supérieure de l’enquête agricole avait proposé Paris pour siège de l’institut ; la société des agriculteurs, en son projet, faisait le même choix. C’est Paris que l’on a définitivement choisi, et cela par plusieurs raisons : d’abord, puisqu’il s’agit d’une école supérieure, véritable faculté des sciences agronomiques, où peut-elle être mieux placée, a-t-on-dit, qu’à Paris même, centre de toutes lumières ? Là sont les plus riches collections, là sont les maîtres les plus célèbres, enfin, et ce fut sans doute la raison décisive, l’institut trouve un local tout prêt dans les bâtimens du Conservatoire des arts et métiers : il y peut être installé sans grands frais, tout en formant un établissement séparé. C’est M. Boussingault, croyons-nous, qui en eut la première idée, dès 1869. Il est vrai qu’en s’établissant au Conservatoire, ou d’une façon générale à Paris, on n’aura point le champ d’expériences sous la main ; mais on objecte qu’il sera peu éloigné. On pourra s’y rendre facilement ; l’administration a arrêté son choix sur la ferme de Vincennes ; l’appropriation en sera facile et on aura le voisinage de l’école d’Alfort, du champ d’expériences de M. George Ville et des collections d’arbres fruitiers créées par la ville de Paris. Cependant nous persistons à regretter que l’institut ne soit point installé à Versailles, où il fut jadis. Versailles est admirablement propre à devenir le siège d’un enseignement supérieur de l’agriculture. Là, sans retomber dans les erreurs passées, sans se lancer dans les aventures d’une exploitation nouvelle, on pouvait profiter des ressources de toute nature qu’offrent son parc, ses jardins, ses bois, ses eaux,