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pouvait qu’offrir des cours de science pure à ces auditeurs indépendans qui viennent chercher une distraction intellectuelle ou un complément de connaissances techniques, suivent tel professeur, non tel autre, sont assidus ou ne le sont pas, le tout à leur fantaisie ; mais le Museum, non plus que le Conservatoire, ne comporte pas un système d’instruction dont toutes les parties se suivent et s’enchaînent, qui retienne les élèves dans les liens d’une exacte discipline. Quant à l’enseignement agricole institué récemment à l’École centrale, il est incontestablement fort utile, mais ce n’est qu’une des branches de l’enseignement général de cet établissement ; peut-il jouer le rôle et exercer dans le pays la grande influence d’une faculté supérieure exclusivement consacrée à la science agronomique ? Non, ce n’est pas au moyen de quelques chaires complémentaires, pièces accessoires et dépendantes d’un tout organisé à d’autres fins, dans l’intérêt ou du naturaliste, tel que le Museum, ou du manufacturier, tel que le Conservatoire, ou de l’ingénieur, tel que l’École centrale, ce n’est pas en obtenant çà et là dans quelques établissemens étrangers une place étroite et secondaire, que l’on dotera l’agriculture de ce haut enseignement qu’elle réclame, C’est une école spéciale qu’il lui faut, un centre indépendant, un organisme distinct qui puisse vivre de sa vie.

La commission le comprit. En cette même séance, le 18 mars 1869, accueillant les conclusions de sa sous-commission, elle émit le vœu qu’un enseignement supérieur fût rétabli, indépendamment de celui que le ministre de l’instruction publique créait au Museum. Le principe de l’institut agronomique était admis solennellement, et dès cette époque les conditions pratiques étaient arrêtées. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire les deux rapports que présenta alors M. Eugène Tisserand, de qui le nom fait autorité en ces matières, et notamment le premier rapport d’octobre 1868. Nous trouvons là, fixés et formulés, tous les traits essentiels de l’organisation qui vient d’être instituée par la loi récente, les élémens que doit comprendre un enseignement supérieur de l’agriculture, les caractères qui le distinguent de l’enseignement secondaire, les principes et les règles qu’il est tenu d’observer. Ainsi, dès 1869, on aurait pu fonder l’institut ; cependant on ne fit rien. Le ministre d’alors, M. Gressier, se montrait médiocrement touché du sort de l’enseignement agricole ; il était même visiblement hostile à la création de l’institut. En tout cas, les choses en restèrent là, malgré la promesse qu’obtenaient, le 17 avril de la même année, 146 membres du corps législatif qui avaient repris le vœu de la commission supérieure. Bientôt après, la Société des Agriculteurs de France, fatiguée de renouveler, chaque année le même vœu sans résultat,