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instituées soient pourvus des appareils mécaniques, des machines et engins nouveaux : c’est ce qui a trop souvent manqué aux fermes-écoles, et il est juste de reconnaître que les directeurs se sont trouvés, en bien des cas, placés, par les nécessités mêmes de l’exploitation, dans des situations difficiles. Les moteurs automatiques ayant pour effet de remplacer un grand nombre de bras, du jour où le directeur avait fait le coûteux sacrifice de doter sa ferme de cet outillage, sur la trentaine d’apprentis qu’il employait, les deux tiers au moins devenaient inutiles : ils retombaient à sa charge, et chacun d’eux lui coûtant de 400 à 500 francs, somme bien inférieure au chiffre de la pension allouée par l’état, il en résultait une perte sèche. Il était dans l’alternative ou de sacrifier l’intérêt de son exploitation à celui de l’école, ou l’intérêt de l’école à celui de l’exploitation. Beaucoup étaient par suite amenés à conserver des procédés arriérés et à faire exécuter le plus de travaux possible par les bras de leurs apprentis : le but de l’institution était ainsi manqué.

Ces conditions fâcheuses peuvent être prévenues plus facilement aujourd’hui : la loi de 1875 impose aux conseils-généraux le devoir de fournir les fonds suffisans pour l’acquisition d’un matériel convenable, et si l’état des ressources départementales les en empêche, l’article 5 réserve à l’administration centrale la faculté d’intervenir pour tout ou partie des frais. De plus, l’article 6 admet que le prix de la pension, dans les écoles pratiques, pourra varier d’un établissement à un autre. Enfin une disposition qui est étendue aux fermes-écoles institue, près de chaque établissement, un comité de surveillance et de perfectionnement. On a le droit d’être un peu sceptique en matière de comités de contrôle, surtout quand il s’agit de comités locaux ; c’est néanmoins ici un élément nouveau de progrès et d’impulsion, et l’administration peut s’en servir utilement.

L’enseignement des écoles pratiques différera-t-il sensiblement des fermes-écoles ? Nous ne le croyons pas. Il sera plus soigné sans doute, mais au fond sera le même. Par exemple, il ne saurait être ici question de programmes uniformes : ils devront se plier aux cultures propres de chaque contrée. Ne serait-il pas d’ailleurs désirable qu’un certain nombre des futures écoles pussent être consacrées à former des travailleurs spéciaux : fromagers, bergers, pradiers, draineurs ? Mais la loi est trop récente pour qu’on puisse l’apprécier par des faits[1]. Si l’on veut bien l’appliquer, elle peut exercer une influence des plus utiles sur l’enseignement élémentaire de l’agriculture. Les écoles pratiques, répondant mieux que

  1. Il n’existe encore qu’une école pratique, celle de Merchines (Meuse).