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d’épouser l’altière Sigrid. Thyri avait dans le pays des Wends des propriétés qu’elle engagea son mari à réclamer. Olaf refusa d’abord, prévoyant les difficultés qui pourraient en résulter avec Sweyn, mais enfin, vaincu par les larmes et les reproches de sa femme, il équipa une flotte et s’apprêta à rendre visite à Burislaf. Alors Sigrid, prenant prétexte de cette expédition, qu’elle représenta comme menaçante pour les princes du Nord, noua contre le souverain de Norvège une coalition où entrèrent son fils Olaf, son mari Sweyn, et le jarl Éric, le fils d’Hakon-Jarl, depuis longtemps ambitieux de venger la mort de son père. Ni les uns ni les autres cependant n’osaient attaquer immédiatement la flotte d’Olaf. Il leur fallait du temps pour se préparer. Dans cet embarras, les coalisés eurent recours au rusé Sigvald, le capitaine de Jomsburg, et le chargèrent de s’insinuer auprès d’Olaf, de surveiller ses mouvemens et de les en informer. Sigvald, acceptant avec empressement cet office d’espionnage et de perfidie, peut-être dans le désir de faire oublier ses anciens péchés contre Sweyn et Hakon-Jarl, joignit en voyage la flotte d’Olaf, gagna sa confiance et l’accompagna chez son beau-père Burislaf, où, l’enguirlandant de flatteries, il sut le retenir sous des prétextes quelconques aussi longtemps qu’il était nécessaire aux préparatifs des coalisés.

Quand ceux-ci eurent enfin réuni une flotte assez considérable pour écraser celle d’Olaf, ils firent un signe à Sigvald, qui ne chercha plus à créer d’obstacles au départ d’Olaf, et le roi reprit fraternellement avec le viking le chemin de la Scandinavie, sans se douter que la trahison guettait son passage de la baie d’une petite île aujourd’hui, paraît-il, reprise par la Baltique. Lorsqu’on fut arrivé proche du lieu désigné d’avance pour être la scène du guet-apens, Sigvald, s’esquivant avec autant d’agilité, mais moins de dommages, qu’il l’avait fait naguère à la baie d’Hjoring devant la victoire d’Hakon-Jarl, laissa le roi seul, réduit à ses propres forces, en présence du formidable armement de ses ennemis. Olaf ne se troubla pas devant cette apparition inattendue et refusa de fuir. « Je n’ai jamais fui d’une bataille, que Dieu dispose de ma vie ! » répondit-il à ses capitaines qui lui représentaient l’inégalité des deux flottes en présence. « Le roi était monté sur le gaillard d’arrière du Long-Serpent, le plus beau et le plus grand de ses navires, dit Snorro Sturleson, cité par Carlyle ; il avait un bouclier doré et un heaume incrusté d’or ; sur son armure, il avait un court habit rouge et se distinguait aisément. » Trois fois son navire fut abordé par Éric, qui trois fois fut repoussé. Olaf combattit tant qu’il lui resta un homme ; puis, sans donner à son ennemi la joie de triompher de sa mort, il se précipita dans la mer. « On le voit encore, dit Carlyle,