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les traductions de nos livres élémentaires se multiplient et réduisent chaque jour davantage le domaine de l’enseignement chinois. C’est là le but qu’il faut atteindre ; si l’on ne peut repousser complètement une littérature qui est demeurée jusqu’ici nationale, il faut soustraire le plus possible les jeunes esprits aux méthodes pédagogiques d’autrefois, qui ne s’adressent qu’à la mémoire, pour leur apprendre à considérer les choses dans leur réalité positive, à les observer avec précision, à en déduire les conséquences avec logique, à former en un mot des jugemens.

Au-dessus de l’enseignement secondaire on ne rencontre pas un enseignement supérieur distribué dans des facultés comme les nôtres, mais une série d’écoles spéciales où les jeunes gens reçoivent une instruction technique et professionnelle. La première difficulté que rencontre le professeur européen, c’est de se faire comprendre avec le secours insuffisant d’un interprète. On a généralement constaté que la langue indigène, même parlée par un lettré de première force (et tant s’en faut que les interprètes le soient tous), ne peut se plier à toutes les inflexions de la pensée, ni reproduire la terminologie compliquée de nos sciences. C’est donc en anglais, en allemand, en français, que se font presque partout les cours, et l’étudiant, pour les suivre, a du se rendre maître au préalable de l’une de ces langues. Aussi chaque école spéciale traîne-t-elle à sa suite des classes préparatoires de langues, où elles entretiennent une pépinière d’auditeurs. C’est là un inconvénient grave ; l’enseignement secondaire devrait fournir un assez grand nombre d’étudians suffisamment au fait des trois principaux idiomes étrangers pour suivre les leçons des professeurs européens ; mais il faudrait pour cela une régularisation générale de tout l’enseignement, qui ne peut résulter que d’une loi d’ensemble, et cette loi n’est ni faite ni projetée.

L’une des plus anciennes écoles spéciales est celle de médecine, précédemment établie à Nagasaki, sous des maîtres hollandais, aujourd’hui installée à Yeddo ; elle comprend 19 professeurs, dont 11 japonais et 8 allemands, et 242 étudians, dont 50 seulement suivent les cours supérieurs et 192 les cours préparatoires. On y enseigne la médecine, la chirurgie, l’anatomie, l’histoire naturelle, la physique, la chimie et la pharmacie. Organisée plus récemment et sur un pied plus modeste, l’école de droit comprend actuellement 20 étudians, qui suivent les cours de deux professeurs français ; elle en a détaché 8 autres en France et doit en posséder un jour un beaucoup plus grand nombre ; on y enseigne le droit naturel, le droit civil et commercial comparé, les élémens du droit pénal et l’organisation administrative. Au ministère des travaux publics est