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pas réussi au siècle dernier à délivrer les Serbes de Turquie de la domination ottomane, l’Autriche leur dénie aujourd’hui le droit de s’affranchir eux-mêmes !

Après la mort de Joseph II, les Serbes espérèrent, — comme ils espéraient à tout avènement, — que leur sort allait s’améliorer, que leurs privilèges, longtemps tenus pour lettre-morte, devaient enfin recevoir une valeur constitutionnelle. Les états hongrois allaient se réunir ; le métropolitain serbe demanda à l’empereur-roi que les Serbes fussent représentés par quelques-uns d’entre eux dans la diète hongroise. La chancellerie hongroise fut d’avis que les états seuls pouvaient statuer sur cette demande. Léopold, passant outre et agréant la requête du métropolitain, fit envoyer des lettres de convocation à celui-ci et aux évêques serbes, mais la diète hongroise ne leur permit pas de siéger. Profitant des bonnes dispositions de l’empereur, le Métropolitain lui demanda l’autorisation de convoquer un congrès national, bien qu’il n’y eût pas de métropolitain à élire, mais pour que les Serbes pussent délibérer sur leurs affaires nationales et qu’ils fissent entendre leurs vœux au moment où la diète hongroise allait s’occuper de leur situation. L’empereur accéda à cette demanda, malgré l’avis contraire de la chancellerie hongroise et du conseil de guerre de la cour. Le congrès fut ouvert en septembre 1790 : entre temps le métropolitain était mort, et le congrès avait à lui donner un successeur.

Les Serbes n’avaient pas perdu, sinon l’espoir, du moins le désir d’occuper un territoire distinct, de former une province de l’empire indépendante du royaume de Hongrie. Le premier acte de l’assemblée fut une requête à l’empereur qui se ramenait aux trois points suivans : 1° formation d’un territoire distinct et création d’une direction spéciale des affaires serbes au siège du gouvernement ; 2° libre exercice du culte de rite oriental, droit de bourgeoisie et accès aux emplois publics ; 3° concession éventuelle d’une constitution particulière aux confins militaires encore existans, au cas où ceux-ci seraient rendus à l’administration civile. Le commissaire de l’empereur au congrès, Schmiedfeld, ayant fait remarquer que la diète hongroise s’opposerait certainement à la création d’une province nouvelle aux dépens du territoire hongrois, cette prétention fut restreinte au banat, qui n’était point encore réincorporé à la Hongrie. La requête fut envoyée à Vienne, et les membres du congrès occupèrent le reste de leur session à élire le métropolitain et à organiser un système d’enseignement avec les fonds empruntés aux revenus de leur église nationale. L’empereur répondit à la requête par des paroles bienveillantes, mais la diète hongroise était loin de montrer des dispositions favorables, et, pour enlever aux Serbes tout prétexte de demander un territoire séparé, elle régla,