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Bas : il le détacha de la France, le réconcilia avec la Grande-Bretagne, et couronna son ouvrage en négociant avec la Hollande et la Suède le fameux traité de la triple alliance, qui arrêta Louis XIV dans l’ivresse de ses triomphes. Plus tard, à Nimègue, il lutta obstinément contre les tendances françaises de sa cour, et il ne signa qu’à contre-cœur les articles d’une paix qu’il regardait comme boiteuse. Il n’eut pas de regrets pour la royauté des Stuarts, qu’il avait toujours jugée trop française ; il n’avait point pris part à la révolution, mais le triomphe de Guillaume III était aussi le sien ; s’il refusa de sortir de son repos pour servir un roi qui depuis longtemps était son ami personnel, ce n’est pas seulement parce qu’il lui en coûtait d’abandonner son repos, ses livres, ses jardins, il voyait sa politique suffisamment couronnée dans la personne d’un prince d’Orange.

Lord Palmerston ne ressemblait certes pas de tout point à son illustre ancêtre : ce n’est pas lui qui eût dit que, passé quarante ans, l’homme n’est propre ni à l’amour ni aux affaires, il n’avait ni l’humeur mélancolique, ni les goûts bucoliques du philosophe de Sheen, mais on trouve chez tous deux une sorte d’aversion, dirai-je républicaine ou aristocratique, pour la cour. Palmerston rappelle surtout Temple, comme politique : ni l’un ni l’autre ils ne furent, à proprement parler, hommes de parti ; ils furent tous deux des patriotes, jaloux de la grandeur anglaise, adversaires implacables, habiles à nouer des alliances contre la puissance française, qu’ils regardaient comme l’ennemie héréditaire de leur pays.

Sir William Temple avait un frère cadet qui devint attorney-général et président de la chambre des communes irlandaises. Le fils de ce frère cadet porta le premier le nom de lord Palmerston. Cette pairie irlandaise fut créée pour lui le 12 mars 1722 : le nouveau pair siégea plusieurs années à la chambre des communes ; il eut un fils qui mourut jeune, laissant pourtant un enfant qui devint le deuxième vicomte Palmerston ; celui dont nous nous occupons, le ministre, fut le troisième vicomte.

Il y a bien peu de chose à dire de ses premières années : le jeune Henry Temple fut élevé à Harrow ; il alla ensuite passer trois ans à Edimbourg, où il suivit les cours de Dugald Stewart. « C’est dans ces trois années, écrivait-il plus tard, que j’ai jeté les fondemens de tout ce que je possède de connaissances et d’habitudes d’esprit utiles. » En 1803, il entra à l’université de Cambridge. Il trouva tout naturel, à peine arrivé à sa majorité, et avant même de prendre son degré de maître es arts, de briguer les voix de son université pour entrer à la chambre des communes, après la mort de M. Pitt en 1806. Il rencontra deux concurrens dans lord Althorp et lord Henry Petty. H passa ses examens en même temps qu’il fit sa campagne