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pendant quelques jours par une sorte de demi-illégalité dont ils sont les complices, et s’occupe d’assurer leur sort, en faisant appel soit aux institutions d’assistance publique, soit aux œuvres charitables, soit même à la charité individuelle. Combien de démarches il faut faire ! combien de lettres il faut écrire ! A combien de portes il faut frapper ! Nul ne le sait mieux que M. Lecour lui-même, qui a été chargé pendant douze ans de ce service, et qui est précisément l’auteur de la déposition que j’ai citée. Mais c’est peut-être parce qu’il le sait trop bien, qu’il n’a pas voulu le dire et qu’il a donné le premier l’exemple de cette discrétion qu’il reproche un peu à la charité anglaise de ne pas savoir garder. Cette réserve ne nous en a pas moins privés d’un chapitre intéressant, où M. Lecour aurait pu nous montrer en détail l’emploi du budget des secours de la préfecture de police. Ce budget s’élève à 50,000 francs et forme un faible appoint du budget général de la charité pour le département de la Seine, que M. Lecour attribue approximativement à 46 millions.

Il y aurait encore beaucoup à dire à propos de ce livre, et un grand parti à tirer des documens qu’il renferme ; mais j’ai voulu dès à présent signaler la publication de ce manuel et eh recommander la lecture. En le parcourant, je me rappelais ces paroles éloquentes de M. Guizot : « si la vie cache de tristes secrets, elle renferme aussi de beaux mystères. » Il appartenait à quelqu’un qui a été comme M. Lecour en situation de contempler cette double face de la vie, de nous initier aux résultats d’une expérience qui n’a rien d’amer, en nous montrant à côté du vice insolent et de la misère sans cesse renaissante la charité miséricordieuse et la générosité intarissable.


OTHENIN D’HAUSSONVILLE.



Histoire de la littérature italienne, par M. Louis Etienne. Paris 1875 ; Hachette.


Les événemens qui ont changé depuis quinze années la face de l’Italie sont de ceux qui éclairent d’un nouveau jour tout le passé d’un grand peuple. Le succès de longs efforts met devant les yeux de l’historien la continuité de ces efforts en pleine lumière ; il aperçoit mieux, le but une fois atteint, par quelles principales voies il a fallu passer, quelles ont été les vraies tendances nationales, et ce qu’a été au vrai le génie de ce peuple. On conçoit que dans l’Italie de nos jours, au moment où une autre ère commence, un patriote tel que le marquis Gino Capponi entreprenne avec succès un tableau résumant l’histoire de la littérature italienne. Descendant de ce Gino Capponi qui fut à la fin du XIVe siècle l’historien du tumulte des Ciompi, — de Neri Capponi, à la fois général et ambassadeur, qui balança le pouvoir de Côme de Médicis, — de Piero Capponi, qui tint si fièrement tête à Charles VIII au nom