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Philippe et Marie, par la grâce de Dieu, roi et reine d’Angleterre, de France, de Naples, de Jérusalem et d’Irlande, défenseurs de la foi, princes d’Espagne et de Sicile, archiducs d’Autriche, ducs de Bourgogne, de Milan et de Brabant, comtes de Hapsbourg, de Flandre et de Tyrol, annonçaient à Ivan Vasilévitch le retour de l’Édouard-Bonaventure dans la Tamise. « Nous sommes informés, écrivaient au tsar les souverains anglais, par le rapport de notre digne et bien-aimé sujet Richard Chancelor, que votre majesté a daigné l’appeler en son impériale présence ; qu’elle l’a traité et festoyé avec une incroyable courtoisie. Nous avons en même temps reçu les lettres expédiées de votre palais de Moscou au mois de février 7063. Nous venons maintenant vous prier de nommer des commissaires qui puissent s’aboucher avec Richard Chancelor, George Killingworth et Richard Gray, porteurs de notre réponse. »

L’Édouard-Bonaventure, le Philippe-et-Marie firent voiles pour la côte du Finmark dans les premiers jours du mois de mai. Vers la fin de l’année 1555, on les vit tous les deux rentrer en Angleterre, non plus sous la conduite de Richard Chancelor, mais sous le commandement de l’ancien maître du Bonaventure, Stephen Burrough. Richard Chancelor, George Killingworth, Richard Gray, Henry Lane et Arthur Edwards avaient remonté la Dwina et ses tributaires jusqu’au 59e degré environ de latitude. Le 11 septembre 1555, la troupe anglaise débarquait dans la ville de Vologda, ayant fait près de 1,100 verstes sans sortir de sa barque, « tous en bonne santé, grâce a Dieu, à l’exception de William, le coq, qui, en partant de Colmogro, tomba du bateau dans le fleuve et ne reparut pas. » Le 28 septembre, les voyageurs se remettaient en route pour Moscou. La boue, cette boue tenace où les voitures entrent jusqu’au moyeu, les contraignit bientôt à revenir sur leurs pas. Il fallut décharger « le sucre de l’empereur. » Au temps de la gelée, le transport de ce don royal offert au tsar par la compagnie ne serait plus qu’un jeu pour les traîneaux. En automne, il était impossible de se frayer un chemin dans la fange avec un tel bagage. Le convoi allégé laissait fort à faire encore aux pauvres chevaux de poste ; mais rien n’est impossible en Russie quand le tsar commande. Les Anglais étaient annoncés, attendus à Moscou. ils y firent leur entrée le 4 octobre 1555. Le 10, on les introduisait dans le château Il rempli d’arquebusiers, » puis du château dans le palais ducal. Killingworth nous a laissé le récit de cette seconde entrevue ; sa déposition confirme de tout point celle de Chancelor. Ainsi que dans l’audience de 1553, les envoyés de la compagnie eurent à traverser plusieurs salles où se tenaient rangés de graves personnages aux longues robes tissues d’or. Sous ces somptueux vêtemens, ces bonnets de fourrures, ces