Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 15.djvu/474

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

victorieusement ! Les républicains du conseil municipal parisien viennent de donner l’exemple de ce qu’on doit entendre par l’esprit nouveau, surtout par le libéralisme nouveau. Ils ont fait une hécatombe d’un certain nombre de pauvres sociétés de bienfaisance que la ville aidait de quelques médiocres subventions. Ces sociétés, il est vrai, n’existent que pour secourir des vieillards, des enfans abandonnés, des femmes en couches ; n’importe, elles étaient suspectes pour leur origine et leur caractère religieux. Les radicaux du conseil municipal parisien n’ont pas pu admettre cela, ils n’ont pas même épargné une modeste et vieille institution qui existe depuis plus de quatre-vingts ans, qui sous le nom de « la charité maternelle » rend chaque jour d’immenses et obscurs services. Notez bien que le conseil municipal n’a rien fait en définitive : il ne peut pas empêcher ces sociétés de vivre même sans le secours de 500 francs ou de 1,000 francs que la ville leur donnait, il n’a réussi qu’à montrer son mauvais vouloir, à rendre surtout plus sensible cette disproportion choquante entre l’importance d’une ville comme Paris, reine par la charité autant que par l’intelligence, et cette médiocrité municipale imbue de préjugés étroits, d’un fanatisme d’un autre genre. Voilà pourtant aussi des républicains, à ce qu’ils prétendent ! — Mais ce ne sont là, dira-t-on, que des excentricités partielles désavouées par la raison ; toutes ces propositions dues à la fantaisie de quelques députés n’ont aucune chance d’être adoptées, elles ont tout juste la valeur que leur donnent les hautes recommandations de M. Floquet et de M. Naquet ! C’est précisément la question et c’est là que nous voulons en venir. L’essentiel est de montrer sans plus de retard que tout cela en effet ne répond à rien, qu’il y a une majorité indépendante de ce radicalisme agitateur et stérile. Cette majorité existe, elle doit exister dans la chambre des députés elle-même comme dans le sénat. Elle est positivement intéressée à dissiper ce qui peut rester d’incertitude, à s’attester par des actes, à donner la mesure de ce qu’elle veut et de ce qu’elle ne veut pas. Cette majorité modérée et le gouvernement agissant d’intelligence doivent se hâter de montrer que la république inaugurée aujourd’hui, organisée par la constitution, placée sous l’autorité de M. le maréchal de Mac-Mahon, dirigée dans les conseils par M. Dufaure, que cette république n’a rien de commun avec les fanatismes, les préjugés et les rêves du radicalisme ! Là est l’intérêt des prochaines discussions parlementaires, de cette session qui vient de s’ouvrir et qui, par le tour qu’elle prendra, va révéler ce que peut le nouveau régime pour la direction de nos affaires intérieures comme pour la sauvegarde de nos intérêts extérieurs.

Le grand intérêt extérieur est évidemment aujourd’hui dans ces affaires orientales qui semblent chaque jour s’aggraver en se compliquant sans cesse d’incidens nouveaux. L’empiré turc a sans doute traversé bien des crises, bien des fois on a annoncé sa mort prochaine. Il