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l’industrie. Nous aurions préféré la méthode de M. Quicherat, qui suit chronologiquement son sujet et le divise par grandes époques et par règnes ; mais, ces réserves faites, nous nous plaisons à reconnaître que le Dictionnaire de l’Ameublement est un livre plein de recherches, et, qu’au point de vue des arts technologiques, il peut fournir de très utiles renseignemens. Ce n’est point en effet un simple attrait de curiosité rétrospective qui fait le mérite de certains travaux d’archéologie, c’est aussi un intérêt éminemment pratique. Le moyen âge en fait de science n’a rien à nous apprendre. Si les chevaliers, les moines et les bourgeois du temps de Philippe-Auguste revenaient dans ce monde, ils se croiraient transportés dans le pays des enchanteurs et des fées, car le génie moderne a réalisé quelques-uns des prodiges que rêvait la sorcellerie. Pour correspondre aux extrémités du monde elle cherchait, sans le trouver, l’alphabet sympathique, et le télégraphe marche aussi vite que la pensée. Elle demandait à l’anneau du voyageur la locomotion rapide et sans fatigue, et la vapeur a résolu le problème. Le tempestiaire prétendait à son gré diriger la foudre, et l’aiguille de Franklin arrache au ciel la foudre obéissante. Le sorcier, à cheval sur le balai du sabbat, croyait se frayer un chemin à travers les airs, et le ballon nous emporte plus haut que les aigles et les nuages. Toutefois, si nous laissons le moyen âge bien loin derrière nous par la pénétration des secrets de la nature, la puissance productive, et même la puissance destructive, il est juste de reconnaître qu’il nous dépasse aussi bien souvent par l’inspiration des artistes et la perfection de la mise en œuvre ; l’industriel, le peintre, le sculpteur, ne l’interrogeront jamais sans profit. L’archéologie est la sœur inséparable des beaux-arts, comme elle est la sœur de l’histoire, et c’est là ce qui fait tout à la fois son intérêt et son importance,


I

Le goût de la parure a précédé les habits, dit M. Quicherat ; cette remarque est de tous points confirmée par les faits. Dans les temps primitifs de la Gaule, les habitans marchaient entièrement nus, ils se tatouaient comme les sauvages, et portaient comme eux des colliers et des bracelets formés de coquillages, d’arêtes de poisson, de petits os, de dents d’ours, de rondelles découpées dans la pierre ; ils taillaient leur barbe en pointe, et, comme si les coiffeurs eussent déjà fait leurs premiers essais, ils relevaient sur leur front une grosse touffe de cheveux. Cet état de simple nature se modifia après une longue suite de siècles, lorsque des hordes descendues des hauts plateaux de l’Asie vinrent prendre possession, de la Gaule quinze cents ans avant notre ère et enseigner aux habitans