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défense complètement rassurante, et il se prépare à l’augmenter par la construction de trois autres forts.

Le gouvernement prussien a déjà fait devant la baie de Kiel des simulacres de combats où l’une des deux parties manœuvrait pour s’emparer de la baie en détruisant un barrage imaginaire. À cet effet, un navire de flottille figurant une frégate cuirassée s’est détaché de l’escadre mouillée devant la baie et s’est avancé jusqu’à la ligne du barrage, essuyant le feu des forts sans être coulé. Après cette reconnaissance, il s’est retiré, puis est revenu au barrage avec deux monitors qui avaient mission de répondre à l’artillerie de terre, tandis que la frégate cuirassée et ses embarcations travaillaient à la destruction du barrage. Pour la seconder, l’escadre envoyait à terre en même temps des troupes de débarquement avec ordre de prendre les batteries à revers. Il était convenu que ces opérations ne réussiraient pas, que les troupes de débarquement seraient repoussées, que le barrage serait reconnu comme indestructible et infranchissable et enfin que l’escadre assiégeante cesserait le combat. C’est ce qui arriverait probablement dans la réalité. Or le gouvernement prussien ne se borne pas à ces défenses de la baie, bien qu’il leur donne, comme on vient de le voir, la supériorité en cas d’attaque. Il a pris d’autres précautions !

Le pourtour du fiord laisse entre la mer et le pied des collines un espace de terrain où les constructeurs auraient pu placer des cales couvertes, des chantiers, des docks et tous les ateliers que comporte un grand établissement maritime ; mais, pour plus de sûreté, l’arsenal et le port ont été concentrés dans un bassin creusé à l’intérieur du fiord, sur la rive orientale, près d’un village de pêcheurs qu’on nomme Ellerbeck. Six ouvrages de défense sont spécialement réservés pour couvrir ce bassin et les établissemens qui l’entourent. Enfin la forteresse de Rendsbourg, enlevée aux Danois et située dans le voisinage, pourrait au besoin porter secours à la flotte ancrée dans le port et prendre entre deux feux les troupes de débarquement.

Au demeurant, le port de Kiel, tel qu’il existe, avec une rade magnifique, un bassin où la mer a 40 pieds de profondeur, où les bâtimens peuvent partout accoster le rivage, où l’on ne rencontre ni courans ni bas-fonds, où la nature a préparé pour ainsi dire l’emplacement de formidables fortifications, n’a rien à envier aux plus beaux établissemens maritimes. La défense en a été réglée par une commission que présidait M. de Moltke en personne ; il est dès à présent imprenable.

Resterait toutefois, pour compléter ces avantages, à creuser un canal qui joindrait la mer Baltique à la Mer du Nord en passant entre le Slesvig et le Holstein, Ce canal existe, seulement il n’est