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ne fût pas augmenté. Où trouver tant de soldats de bonne volonté? C’est affaire d’argent, répondait-on; en y mettant le prix, on s’en procurera autant qu’il sera nécessaire.

Ce n’est pas tout d’avoir des sabres, des canons et des baïonnettes. Il est admis maintenant que les troupes doivent être prêtes à entrer en campagne une semaine ou deux après que l’ordre leur en est donné. Un plan de mobilisation doit être arrêté d’avance, en sorte que chaque bataillon connaisse son lieu de rassemblement, chaque officier sache l’emploi qu’il occupera. Pour l’armée anglaise, ce plan est plus compliqué que pour toute autre armée du continent, en raison des élémens qui la composent. S’agit-il en effet d’une opération au dehors des îles britanniques, les régimens de l’armée régulière marcheront seuls; une invasion est-elle imminente, tous sont appelés à défendre la patrie, réguliers, miliciens, et volontaires. En vue de cette double conjoncture, les troupes sont réparties en huit corps d’armée de chacun trois divisions. Le premier corps, dont le quartier-général est à Colchester, entre Londres et la Mer du Nord, ne comprend que des troupes de l’armée active ; c’est à lui que reviendrait l’honneur de s’embarquer dès le début de la guerre pour une expédition lointaine. Le second, à Aldershot, contient deux divisions de réguliers et une de milice; le troisième a une division de réguliers composée des régimens à pied de la garde, les plus belles troupes de l’armée britannique, avec deux divisions de milice; il est cantonné autour de Croydon. Quant aux cinq derniers corps, qui ont leurs quartiers-généraux à Dublin, Salisbury, Chester, York et Edinburgh, il n’y a dans chacun d’eux qu’une brigade de troupes régulières, c’est-à-dire ce qu’il en faut au plus strict pour soutenir les régimens de la milice. En définitive, les trois premiers corps participeront, en tout ou en partie, aux opérations d’une guerre offensive; les cinq derniers sont chargés de la défense du pays.

Comme la moitié de l’armée est envoyée à tour de rôle dans l’Inde ou dans les autres stations lointaines, on ne sait pas quels régimens seront présens dans la métropole au jour de la déclaration de guerre. Aussi les régimens composant chaque brigade sont-ils désignés dans l’ordre de mobilisation non par leur numéro d’ordre, mais par la garnison qu’ils occupent. C’était peut-être inévitable. Toutefois cette façon de procéder présente l’inconvénient que les troupes destinées à faire campagne ensemble seront quelquefois étrangères les unes aux autres, ce que l’on a voulu éviter dans les organisations des armées continentales. Pour les miliciens, chaque bataillon sait au contraire à quel corps il appartient. On a pris soin de les encadrer dans les corps d’armée voisins des comtés où ils se recrutent; à ce titre, c’est une force locale. Il y a néanmoins quelques