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raison en est dans la lenteur extrême avec laquelle les chemins de fer ont pénétré dans las pays qui auraient pu faire naître des poulains en abondance. Pour en sortir, ces jeunes chevaux auraient eu à subir les fatigues, d’un long voyage, auxquelles ils savent moins bien résister que les taureaux du même âge. A présent, le transport de ces jeunes animaux peut s’effectuer d’un pays à l’autre aussi rapidement qu’économiquement et sans le risque des maladies qui sont la suite des souffrances en route. Les chemins de fer ont donc lever l’obstacle le plus grave à l’établissement d’un tel courant commercial ayant d’autant mieux sa raison d’être, qu’il enlèverait les jeunes poulains aux sols peu fertiles où ils sont condamnés à une croissance lente et chétive, et qu’il les amènerait dans de fertiles pâturages, où ils prennent un magnifique développement, tout en conservant cette élégance native du cheval méridional. Ces animaux pourraient quitter les pâturages vers l’âge de trois ans pour se rendre dans les plaines à sol léger, où la culture se pratique à l’aide de chevaux soumis à un labeur modéré ; ils paieraient une partie de leurs frais d’entretien et deviendraient de robustes bêtes de travail ou de vaillans chevaux d’armes au lieu des modestes montures qu’ils auraient été en restant sur leurs montagnes natales. Ces pays convenant à l’emploi agricole du jeune cheval devraient être spécialisés pour l’éducation des poulains de trois ans et débarrassés du soin de les faire naître.

Il y a donc d’utiles et indispensables rapports à établir entre les pays de naissance et ceux d’éducation ; mais les poulains sont en si petit nombre sur les marchés du centre et du midi, que des acheteurs du dehors ne s’y présentent point, dans la crainte d’un dérangement inutile. Il n’y a point d’exportation faute de production, et point de production, faute d’exportation. Pour sortir de ce cercle vicieux, il faut que dans chaque contrée susceptible de devenir un centre de production, il soit établi de grands concours de poulains suivis de ventes publiques. Encouragés par l’espoir des récompenses autant que par la confiance de trouver un facile débit de leurs jeunes animaux, les petits propriétaires livreraient leurs jumens de service à la reproduction, tandis, que les acheteurs étrangers seraient amenés à ces grandes réunions hippiques par la certitude de ne pas manquer de choix au milieu d’animaux si nombreux. Pour cela, il ne serait pas nécessaire d’accroître beaucoup le chiffre des primes actuellement allouées par l’état, par les départemens et par les diverses sociétés agricoles ; il suffirait de faire un meilleur emploi de ces ressources en ne les éparpillant plus dans des petits concours d’arrondissement et même de canton. De telles exhibitions sont généralement trop peu nombreuses pour constituer de vrais marchés ayant de la notoriété et attirant des acquéreurs du dehors. Elles ne sauraient être fructueuses au point de vue de la vente, ce qui est le but même de toute production. Il est du reste d’usage que le transport des animaux