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premier lord de la trésorerie, lord Ellenborough, premier juge, lord Erskine, chancelier, lord Spencer, secrétaire d’état, furent chargés de cette enquête en vertu d’un ordre secret signé de la main même du roi le 29 mai 1806. Le résultat de la procédure fut que l’accusation de grossesse et d’accouchement clandestin devait être rejetée, mais que certaines particularités dans la conduite de la princesse donnaient lieu à des interprétations très défavorables. Les hauts commissaires ajoutaient : « On doit ajouter foi à ces circonstances révélées par les témoins tant qu’elles n’auront pas été réfutées d’une manière décisive, et, si elles sont vraies, elles méritent d’être prises en très sérieuse considération. » Le roi ayant communiqué ce rapport à la princesse de Galles, elle confia sa défense à trois personnages politiques considérables, lord Eldon, M. Perceval, M. Plomer, qui attaquèrent très vivement dans leur mémoire et la procédure des commissaires et les témoignages produits contre leur cliente. La cause ainsi entendue, il ne restait plus qu’à prononcer la sentence. Le roi s’en remit à son conseil du soin de la rédaction. Le fond était conforme à ce que nous venons d’indiquer : déclaration par les quatre lords de l’innocence de la princesse de Galles en ce qui concerne l’accusation de grossesse et d’accouchement clandestin, expression du contentement causé au roi par ce verdict, toutefois nécessité d’un avertissement sérieux à la princesse, car l’enquête présentait des circonstances que l’on ne pouvait considérer sans inquiétude. En somme, les ennemis de l’accusée avaient le dessous.

Ce jugement allait être communiqué à la châtelaine de Blackheath, quand le prince pria le roi de surseoir jusqu’à ce qu’il lui eût mis sous les yeux un nouvel exposé des faits. Ce sursis, qui aurait pu être funeste à la princesse, lui procura au contraire une plus complète victoire. L’affaire était encore pendante lorsque le ministère de lord Grenville fut remplacé par celui du duc de Portland ; or deux des défenseurs de la princesse, lord Eldon et M. Perceval, faisaient partie de la nouvelle administration, le premier comme lord chancelier, le second comme chancelier de l’échiquier et chef de la chambre des communes. Ils n’abandonnèrent pas, on le pense bien, la cause qu’ils avaient si vivement défendue ; lord Grenville et ses collègues avaient acquitté la princesse au sujet des accusations principales en laissant subsister des doutes fort graves sur le reste ; lord Eldon et M. Perceval firent accepter par le ministère du duc de Portland une déclaration qui la justifiait sur tous les points. Les ministres engagèrent donc le roi à la recevoir à la cour ; on lui désigna des appartemens au palais de Kensington, et elle fut invitée aux réceptions officielles. Au fond, rien n’était changé dans ses rapports avec les autres membres de la famille royale. Ce fut