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hommes en vérité, ces batailleurs du moyen âge, toujours prêts à fondre de leur castel pour faire le coup de lance contre les voisins, hardis comme des lions et avides comme des loups, inaccessibles à la fatigue et aux maladies ! L’un, Garcia Lopez de Salazar, dit Bras de fer, qui mourut au siège d’Algésiras en 1344, âgé de cent trente ans, après avoir engendré deux fils légitimes et cent vingt bâtards ; l’autre, Juan Lopez, qui vécut jusqu’à cent vingt ans, sans antre occupation que de guerroyer ; un second Juan Lopez, noyé à quatre-vingts ans par ses ennemis avec son jeune fils, et qui, les pieds liés, une pierre au cou, comme l’eau du ruisseau était peu profonde et que ses bourreaux le frappaient de leurs lances, relevait encore la tête pour leur crier : « Frappez, frappez, fils de chèvres ; si comme j’ai une âme en un corps, j’en avais cent, vous ne pourriez encore vous venger de moi, tellement dans ma vie j’ai tiré du sang à votre lignage ; frappez tant que vous pourrez, fils de chèvres ! » Le plus célèbre enfin, Lope Garcia de Salazar, vaillant comme tous ceux de sa race, qui, à soixante-douze ans, après mille hauts faits, emprisonné par son fils Juan le More, compose vers 1470, pour chasser ses sombres pensées, son livre encore inédit : Libro de las buenas andanzas é fortunas, des adventures heureuses et contraires, simple récit des divers événemens connus de lui ou accomplis sous ses yeux. C’est le premier ouvrage écrit en castillan que puissent consulter la science héraldique et l’archéologie.

Cependant, par une curiosité toute naturelle, au milieu de ses travaux historiques, l’idée était venue à Trueba de rechercher aussi les traces de sa famille ; on a beau être le fils de ses œuvres, on n’est pas fâché de connaître et de pouvoir citera l’occasion la longue suite de ses aïeux. Du reste le fait en soi n’a rien d’étonnant dans un pays comme la Viscaye, où les deux tiers des habitans sont hidalgos et font remonter leur noblesse aux première temps de la guerre des Maures, où, dans le moindre village, nombre de pauvres maisons portent sur leurs façades de pierre, au-dessus de l’arc de la porte, un et deux écus aux armes parlantes. Trueba put constater ainsi que, malgré la pauvreté où il était né lui-même, l’origine de sa race était des plus vénérables. La famille de Trueba tire son nom d’un petit village situé dans le cercle de Montija (Vieille-Castille) qui confine avec la partie orientale du señorio de Viscaye. Ce village, aujourd’hui dépeuplé, existait encore vers la fin du XVIe siècle, ainsi qu’il appert d’un parchemin conservé dans les archives municipales de Bilbao et rédigé après enquête à la demande de Juan Fernando de Trueba, habitant de Balmaseda et administrateur des douanes royales. La maison originaire de