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l’incendie de Chicago en 1871, ni celui de Boston qui éclata l’année suivante, ne causèrent une émotion analogue. L’Amérique ne s’est pas encore relevée de ce coup, qui a eu son retentissement sur toutes les places, à Chicago, à Saint-Louis, à la Nouvelle-Orléans, à Pittsburg, à Philadelphie, à Boston, et jusqu’à San-Francisco, tant les intérêts sont solidaires dans les grandes affaires de banque et d’industrie. Les chemins de fer ont pâti les premiers de cette crise, puis la métallurgie de la fonte, du fer et de l’acier, qui a du récemment diminuer sa production, jusque-là toujours croissante. En 1873, on n’a plus construit que 4,000 milles de railways et 2,000 seulement en 1874 ; ce n’est plus qu’une moyenne annuelle de 3,000 milles au lieu de 6,500 que donnaient les précédentes années. En 1875, le mouvement s’est, dit-on, encore ralenti. Heureusement que le tonnage des marchandises transportées sur l’ensemble des voies n’a pas diminué. Telle qu’elle est actuellement, la situation reste favorable. A la fin de 1874, les États-Unis possédaient à eux seuls une longueur de voies ferrées de 73,000 milles, environ 117,000 kilomètres, ou près de la moitié de la longueur totale des railways existant sur le globe. L’Angleterre et l’Allemagne possédaient chacune 26,000 kilomètres, la France 20,000 et tous les autres pays du globe ensemble n’en avaient que 85,000 ; cela donne une longueur totale de 275,00 kilomètres ou 69,000 lieues, de quoi faire environ sept fois le tour de la circonférence terrestre.

Le coût moyen de l’établissement des chemins de fer en Amérique par kilomètre construit est moins élevé qu’en Europe. Il existe à cela deux raisons : d’abord le prix des terrains traversés est nul ou peu élevé ; ensuite une très grande simplicité, on l’a vu, est adoptée dans la construction de la voie. Le prix d’établissement n’est guère que de 180,000 francs par kilomètre en moyenne. Il en résulte que les 117,000 kilomètres de chemins de fer des États-Unis ont coûté 20 milliards de francs. C’est aussi ce qu’a coûté à l’Union la guerre de sécession, et l’on peut mettre en présence les deux sommes, l’une si productive et si féconde en résultats, l’autre avec toutes les conséquences négatives et toutes les destructions que la guerre entraîne après elle. On calcule qu’un millier de compagnies existent sur toute la surface de l’Union. Ce capital de 20 milliards est à diviser entre elles ; mais sur le nombre il y en a le dixième environ qui ne donnent aucun dividende et ne peuvent faire face à leurs engagemens ; c’est donc de ce chef 2 milliards entièrement perdus. Les autres compagnies donnent des dividendes qui varient de 3 à 10 pour 100 ; la moyenne est de 4 à 5, et ce taux d’intérêt diffère peu de celui que donnent la plupart des compagnies anglaises ou françaises ; mais il faut noter qu’en Amérique le prêt de l’argent est à un taux plus fort qu’en Europe. Le nombre si grand des