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LES
MAITRES D'AUTREFOIS

II.
RUBENS ET L'ECOLE FLAMANDE.[1]


I


Anvers.

Beaucoup de gens disent Anvers ; mais beaucoup aussi disent la patrie de Rubens, et cette manière de dire exprime encore plus exactement toutes les choses qui font la magie du lieu : une grande ville, une grande destinée personnelle, une école fameuse, des tableaux ultra-célèbres. Tout cela s’impose, et l’imagination s’anime un peu plus que d’habitude quand, au milieu de la Place verte, on aperçoit la statue de Rubens et plus loin la vieille basilique où sont conservés les triptyques qui, humainement parlant, l’ont consacrée. La statue n’est pas un chef-d’œuvre ; mais c’est lui, chez lui, et sous la figure d’un homme qui ne fut qu’un peintre, avec les seuls attributs du peintre, en toute vérité elle personnifie l’unique royauté flamande qui n’ait été ni contestée ni menacée, et qui certainement ne le sera jamais.

A l’extrémité de la place, on voit Notre-Dame ; elle est de profil et se dessine en longueur par une de ses faces latérales, la plus sombre, parce qu’elle est du côté des pluies. Son entourage de maisons claires et basses la rend plus noire et la grandit. Avec ses architectures ouvragées, sa couleur de rouille, son toit bleu et lustré, sa tour colossale, où brillent dans la pierre enfumée par les vapeurs de l’Escaut et par les hivers le disque d’or et les

  1. Voyez la Revue du 1er janvier.