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périence, il n’y a point eu un pouvoir plus sincèrement, plus universellement accepté. Que la politique qui met sur son programme le nom et l’autorité de M. le maréchal de Mac-Mahon doive être en même temps conservatrice, qu’elle soit tenue de garantir fermement la paix intérieure, sans laquelle il n’y a ni vie régulière, ni travail, ni prospérité, aucun esprit réfléchi ne le met en doute. Les républicains sensés eux-mêmes ne méconnaissent pas le danger des agitations, la nécessité de désintéresser le sentiment conservateur du pays, et c’est là encore un point qui n’est contesté que par le radicalisme révolutionnaire ; mais en même temps cette politique, qui se dégage de toute une situation, de tous les instincts, de tous les besoins du pays, cette politique prend nécessairement aujourd’hui une forme et un nom plus précis : c’est la politique constitutionnelle.

On peut en dire ce qu’on voudra, cette constitution du 25 février a du moins le mérite d’être née de la force impérieuse des choses, de l’impuissance des partis, qui ont essayé tour à tour et inutilement d’imposer leurs prétentions. Elle a l’avantage de réunir les garanties conservatrices les plus essentielles, sans enchaîner la souveraineté nationale comme aussi sans la condamner fatalement à une révision que les partis ennemis se promettent de transformer en révolution. Œuvre de transaction, de prévoyance et de raison, elle est comme un traité de paix entre les esprits modérés, et en définitive c’est l’interprétation universellement acceptée. C’est le langage que tient le centre gauche dans un manifeste où il raconte ce qu’il a fait, ce qu’il a voulu faire, où il caractérise justement les institutions nouvelles, en répudiant les « traditions trop fameuses » de la république de 1793. C’est le résumé du programme parfaitement net que M. le ministre des finances vient de signer avec M. Feray et M. Gilbert-Boucher en se présentant pour le sénat aux élections de Seine-et-Oise. Rien de plus simple : « adhérer sans réserve à la constitution et respecter scrupuleusement les pouvoirs conférés à M. le maréchal de Mac-Mahon, — regarder la clause de révision comme une porte ouverte aux améliorations du gouvernement, républicain et non comme un moyen de le renverser. — Faire tous nos efforts pour préserver notre pays d’une révolution, quelle qu’elle soit. » Que disent de leur côté M. Waddington, M. Henri Martin, M. de Saint-Vallier, dans la circulaire qu’ils adressent en commun au département de l’Aisne ? « Nous soutiendrons l’autorité légale du maréchal-président de la république ; nous défendrons fermement la constitution contre les attaques des partis, dont le succès amènerait une nouvelle guerre et peut-être une nouvelle invasion de notre patrie. » Sous des formes diverses, c’est toujours la même pensée : respect du pouvoir de M. le maréchal de Mac-Mahon, politique libéralement conservatrice, union de tous les esprits modérés dans la