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plus faciles à réunir, où l’installation des services est plus parfaite, mais où les principes morbides s’accumulent, est vivement attaquée par des médecins autorisés, même pour les villes ; il ne saurait être question de la transporter dans les campagnes. D’ailleurs un hôpital cantonal pouvant contenir une quarantaine de lits ne coûterait pas moins de 70,000 à 80,000 francs, fût-il construit sur le plan le plus simple et dans les conditions les plus modestes. L’entretien de chaque lit ne peut être évalué à moins de 400 à 500 francs par an. Ce serait là, s’il était généralisé, un mode d’assistance fort coûteux ; grâce à Dieu, tant d’argent n’est point nécessaire pour assister à domicile les malades et les infirmes. Réservons donc l’hôpital pour les affections qui exigent un traitement compliqué, des appareils spéciaux, et appliquons-nous à faire soigner chez eux les malades ordinaires, les infirmes et les vieillards. — Il existe en effet un danger qui ne doit pas échapper au législateur. Dans notre société contemporaine, les liens de la famille s’affaiblissent, l’autorité du père et le respect dû au vieillard tendent à s’effacer ; mais nulle part ce relâchement d’une autorité et d’un respect nécessaires n’est plus marqué que dans les campagnes, où il s’aggrave de la brutalité inhérente à des natures incultes et grossières. Le vieillard et l’infirme qui ne peuvent plus travailler sont bien vite considérés au village comme un fardeau dont la famille n’aspire qu’à être débarrassée, et, comme l’hospice départemental est rarement en mesure de leur ouvrir ses portes, la condition de ces infortunés devient déplorable. Quels services ne rendraient pas les bureaux de bienfaisance, si, par des secours habilement distribués, ils pouvaient intéresser les parens ou les amis de ces malheureux à prendre soin de leur misère !

Il y a plusieurs manières de concevoir et d’organiser l’assistance médicale à domicile. Le système le plus ancien et le plus répandu aujourd’hui encore en France est le système cantonal. Appliqué d’abord en Alsace, où il s’est toujours maintenu, recommandé en 1833 par l’Académie de médecine à la suite d’une longue discussion, combattu en 1845 par le congrès des médecins de France, adopté par M. de Salvandy dans le projet d’organisation de l’assistance médicale qu’il soumettait aux chambres en 1847, toujours patronné depuis par l’administration, il s’étendit un moment à un grand nombre de départemens. Un rapport ministériel du 24 avril 1867 en définissait ainsi le mécanisme : « le service de chaque circonscription cantonale est confié à un médecin désigné par le préfet. Chaque année, le bureau de bienfaisance de là*commune, ou, lorsqu’il n’en existe pas, une commission composée du maire, de l’adjoint et du curé, dresse en présence du médecin la< liste des