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Bien des symptômes existent déjà de l’imminence d’un tel réveil, Même aux époques les plus troublées, l’industrie et le commerce ont eu leur mouvement accoutumé. Dans les localités un peu éloignées des mouvemens politiques, l’existence n’a guère changé : à Madrid, ni les plaisirs ni les affaires n’ont chômé ; il semble que les particuliers aient à peine souffert de la cessation du fonctionnement administratif qui affectait au contraire si profondément les finances de l’état. Le mouvement des chemins de fer l’atteste avec évidence. En prenant pour exemple les quatre lignes dont le trafic est le plus régulièrement établi, on constate des augmentations, même pour les plus mauvaises années. En 1873, le réseau de Madrid-Saragosse-Alicante donne une recette de 35 millions, et en 1874 de plus de 36 ; le Nord de l’Espagne encaisse 16 et 18 millions, le Cordoue-Séville 3,400,000 et 3,600,000, le Pampelune-Barcelone 5,800,000 et 8,220,000. Si l’on remonte à l’année 1868, avant la révolte d’Alcolea, les recettes brutes pour l’Alicante s’élevaient à 27 millions, pour le Nord à 17, le Séville-Cordoue à 2,900,000 et le Pampelune à 9,800,000, Sur deux de ces chemins, le Pampelune et le Nord, la guerre carliste a interrompu le trafic dans une grande étendue, et cependant le résultat est encore à peu près égal ; pour les deux autres, l’augmentation est considérable. Ces chiffres nous paraissent concluans.

Cet accroissement du trafic ne coïnciderait pas avec un mouvement analogue du commerce général, si l’on s’en rapportait au tableau publié par la direction espagnole des douanes sur les quantités et la valeur des principaux articles exportés par les douanes espagnoles (îles Baléares comprises). Les dix premiers mois de l’année 1874 ont donné, d’après ce document, sur la même période de l’année précédente une diminution de produits exportés pour une valeur de 127 millions de francs ; mais en analysant ces chiffres l’on voit que la diminution porte tout entière sur les céréales, les spiritueux, etc. La récolte d’une année a été plus mauvaise que l’autre, c’est la loi du temps contre laquelle on ne peut rien ; mais d’autre part l’extraction des minéraux a été plus abondante, l’exploitation des mines d’Almaden et de Rio-Tinto a singulièrement gagné au nouveau régime, le produit du timbre, affermé aussi à une régie particulière, est plus élevé qu’auparavant. On peut citer encore les résultats de plus en plus fructueux que donnent les sociétés des mines de zinc de la côte asturienne, les mines de plomb, de cuivre, de calamine, etc. ; la production du sel a fort augmenté. Il n’est pas douteux non plus que les chiffres de l’importation ne se soient accrus, car sans cela on ne pourrait se rendre compte de l’augmentation du trafic des chemins de fer, lequel n’est pas dû au trafic des