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nature, être semée ; » mais, à côté de ces raisons spéculatives, il en place heureusement de l’ordre expérimental, savoir : les exemples de reproduction artificielle des champignons par un traitement particulier du bois de peuplier et par le conglomérat tufacé de la pierre à champignon ou pietra fungaia des Italiens. Le premier fait, déjà connu de Dioscoride, concerne un agaric que les Grecs appelaient œgerites, et qui porte à Montpellier le nom vulgaire de pivoulada ou champignon de peuplier. On reproduit à volonté ce champignon’ en enterrant à moitié des rondelles de bois de peuplier blanc ou noir récemment coupé, soit qu’on se contente de les mettre dans un sol fumé, soit qu’on arrose avec du levain délayé dans l’eau la partie du tronc restée en terre, et qui le plus souvent n’a pas besoin d’un traitement particulier pour donner Une vraie moisson d’agarics. Ici l’on peut se demander si le blanc du champignon (mycélium) présent à l’état latent et rudimentaire dans le tissu cortical et ligneux de l’arbre contribue seul à la formation de l’agaric, ou si les spores des générations précédentes germent et forment un mycélium nouveau d’où procèdent les appareils fructifies (chapeau, lamelle, stipe ou pied), qui semblent constituer tout le champignon. Même doute quant à l’origine du polypore (polyporus tuberaster), qui sort de la pietra fungaia. Il est évident que cette prétendue pierre renferme dans sa masse hétérogène et en partie organique un mycélium vivace, d’où pullulent, sous l’influence d’arrosemens faits avec des liquides azotés, les générations successives de champignons comestibles ; mais il est bien possible que les spores interviennent pour le rajeunissement du mycélium. En tout cas, les anciens, ne distinguant pas entre le mycélium (partie végétative) et les spores, faisaient beaucoup en attribuant à des germes, même hypothétiques, l’origine de ces productions équivoques, que l’on rattachait le plus souvent à la génération spontanée.

A vrai dire, le premier auteur à qui l’on doive la mention expresse et la description superficielle dès graines des truffes est le savant Claude-Joseph Geoffroy, appelé le Jeune, pour le distinguer de son frère aîné, Etienne-François, membre comme lui de l’Académie des Sciences. Ses Observations sur la végétation des truffes (1711) signalent dans le parenchyme ou tissu transparent de ces productions « des points noirs, ronds, séparés les uns des autres, et qui ont tout l’air d’être des graines nourries dans le parenchyme, dont elles ont obscurci la couleur. » Bientôt après (1729), le fondateur de l’étude des cryptogames, l’illustre Florentin Micheli, décrivait et dessinait ces germes de truffes tels qu’on les trouve dans les vésicules qui les renferment par groupes, et que l’on appelle aujourd’hui thèques ou sporanges.