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dans le voisinage des montagnes. On y trouve d’excellens bois de construction, notamment du chêne et du sapin; mais le défaut de tout aménagement y a conduit à un déplorable gaspillage, et, comme la plupart sont, faute de chemins, difficilement accessibles, on n’a encore que très faiblement tiré parti des ressources qu’elles offrent. Peu de contrées possèdent des forêts de chênes aussi importantes. A côté de cette essence dominante, que l’on rencontre jusqu’à une hauteur de près de 1,100 mètres au-dessus du niveau de la Mer-Noire, les arbres principaux des Carpathes sont le hêtre, le sapin et le pin sauvage jusqu’à la limite extrême de 2,000 mètres, au-delà de laquelle on ne voit plus que des plantes alpines. Dans la plaine croissent surtout l’orme, le frêne et l’érable.

La difficulté d’accès des hautes forêts de montagne est la cause d’un renchérissement des bois qui a permis à la Bukovine d’en importer elle-même en Roumanie de plus en plus par les voies fluviales. En revanche, l’exportation des douves de chêne roumaines, que leur qualité supérieure fait distinguer, a pris un grand essor. Ajoutons que, les ménages ruraux se servant encore presque exclusivement de vases et d’ustensiles en bois, celui-ci trouve aussi un large emploi dans la boissellerie commune, dont s’occupent spécialement les tsiganes.

Les bords et les îles du Danube ne manquent pas non plus de bois. Le défaut d’arbres ne commence à frapper que dans les plaines de la Grande-Valachie. Là il y a des districts où l’on n’en découvre pas un à plusieurs kilomètres de distance. Tel est surtout le Baragan, qui s’étend à l’est de Bucharest jusqu’au Danube. L’aridité de cette steppe vient surtout du manque d’eau; on a pensé y remédier par des puits artésiens, qui ont toutefois jusqu’à présent peu réussi en Roumanie. D’innombrables troupeaux de moutons et de bœufs paissent durant tout l’été dans ces plaines immenses, où l’œil n’aperçoit de tous côtés que des herbes épaisses parcourues par des bandes de vautours, de grues, d’outardes, de cailles et d’autres oiseaux. Pendant l’hiver, on est menacé de grands dangers dans cette vaste solitude, la violence des vents y emportant parfois des troupeaux entiers pour les ensevelir sous les neiges, ou les jeter dans les lacs du canal de Bortcha, à l’est du Baragan.

En Roumanie comme partout, le revenu foncier varie naturellement d’année en année et suivant les localités ; il augmente à mesure que l’on approche des ports et des grandes villes. En général il a une tendance constante à monter, et le fait est que la valeur foncière et locative des biens a depuis trente ans pour le moins décuplé dans cette contrée. Si la rente de la terre n’y ressort généralement pas à moins de 10 pour 100 du prix d’achat des domaines,