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des pâtres et des conducteurs de chariots, ou bien aussi des fermiers et traitans. La ville de Ploesti, que les avantages de sa situation sur la route commerciale de Bucharest à Kronstadt font prospérer à vue d’œil, et qui compte aujourd’hui 28,000 habitans, est une colonie bulgare. Une des plus florissantes exploitations rurales de la Valachie est la création d’un Serbe, qui s’est enrichi par le commerce des sels du pays ; mais la figure qui se détache avec le plus d’éclat de tous les autres types orientaux, c’est celle de l’Albanais ou arnaute. Il frappe par son air martial et l’élasticité de son pas et porte fièrement son riche costume.

Quant aux Grecs, ils se sont répandus dans le pays dès avant, mais surtout durant la période du règne de leurs compatriotes du Fanar ; leur langue y était même devenue, sous ces princes, celle de la cour et de toute la haute société ; elle n’y perdit ce privilège qu’avec l’arrivée des Russes, qui introduisirent l’usage du français et déterminèrent ainsi la faveur générale dont il jouit depuis. Actuellement les Grecs, ainsi que les Arméniens vivant en Roumanie, sont principalement gens d’affaires, de négoce et de banque. Le commerce des céréales par exemple, le plus important du pays, est presque entièrement entre leurs mains à Galatz et sur les autres places d’exportation. Les Hongrois sont les uns catholiques romains, comme aussi les Polonais, anciens réfugiés pour la plupart, les autres réformés, de même que les Szeklers, dont il existe plusieurs villages sur le territoire roumain même, à la frontière de Transylvanie. Les Hongrois s’occupent surtout des chevaux et du bétail.

Un certain nombre de Grecs et de Bulgares sont placés en Roumanie sous la protection de la Russie. Cependant on ne voit que peu de Russes proprement dits en Valachie et à Bucharest même, où les représentais de leur race les plus nombreux sont encore les sectaires lipowans, que l’on peut recommander, malgré la bouffissure déplaisante de leurs figures imberbes, comme les meilleurs cochers de ville. Ce sont d’ailleurs, abstraction faite des effets d’une superstition monstrueuse, des gens économes, rangés et de bonne tenue. Les Turcs ne pouvant acquérir aucune propriété foncière sur le territoire roumain, on ne trouve de sujets de la Porte que dans les ports danubiens, où le commerce les attire. Parmi les membres de la colonie formée par les nations occidentales figurent environ 35,000 Allemands, en grande majorité sujets de l’Autriche, 2,000 Français, des Anglais, d s Belges, des Suisses, des Italiens, des Américains même, bref des gens de tous les pays. Cette colonie, fixée en majeure partie dans les villes principales, mais surtout à Bucharest, forme à elle seule presque tout l’élément bourgeois du pays. Elle s’y partage le commerce avec les Grecs, les Arméniens et les Juifs, et suffit par son industrie aux besoins les plus