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de ses applications. Au reste, sous l’influence de la transformation de l’industrie par la vapeur, de la création des chemins de fer, de la substitution du fer au bois dans la construction et l’art naval, la consommation du fer, de la fonte et de l’acier s’accroît avec une rapidité que la production a peine à suivre malgré l’énergie de ses efforts. « Dans l’espace de quatre-vingt-deux ans, de 1787 à 1869, dit M. Caillaux, la production de la fonte en France est devenue plus de cinquante-sept fois et celle du fer plus de trente-sept fois plus grande, et depuis quarante ans seulement, depuis 1835, elles ont l’une et l’autre presque quintuplé, tandis que la production de l’acier a augmenté dans la proportion de plus de 1 à 20. »

Si l’on passe en revue tous nos principaux gisemens pour en étudier l’histoire, en connaître l’allure et en apprécier les ressources, on recueille nombre de faits intéressans. Bornons-nous à signaler l’importance des minerais oolithiques de la Moselle et de la Meurthe, dont les couches profondes, exploitées souterrainement, paraissent s’étendre au loin vers l’ouest, — les qualités précieuses des fers spathiques de la Savoie, — l’activité renaissante de l’exploitation, dans l’ouest de la France, des minerais tertiaires ou anciens, — l’opportunité de travaux sous-marins au gîte de Dielette, dont le minerai donne 50 pur 100 de fonte ou de fer, — les gisemens à peine étudiés, et pourtant riches et puissans, dans le Puy-de-Dôme et le Cantal. Plusieurs gîtes de haute qualité pourraient être exploités, si les voies de communication, mieux développées, permettaient d’établir de faciles relations entre eux et les grandes usines qui fondent les minerais. Tels sont entre autres les filons de fer oxydulé du Var et des Alpes-Maritimes et les minerais manganésifères de l’Aude et de l’Ariège. Il y a d’autant plus d’intérêt à ouvrir l’accès de ces gisemens qu’avec l’Alsace et la Lorraine nous avons perdu près du dixième des concessions actives.

L’évolution qui s’accomplit aujourd’hui en Europe dans l’industrie houillère donne un intérêt spécial à tout ce qui se rattache à l’exploitation de nos combustibles minéraux : anthracite, houille, lignite et tourbe. Le remarquable rapport présenté par M. Ducarre à l’assemblée nationale[1] expose qu’avant de s’étendre sur le continent la crise actuelle s’est manifestée d’abord en Angleterre par la hausse des prix du coke malgré l’augmentation continue de la production. Il montre en outre que la cause déterminante de cette crise doit être cherchée surtout dans le développement inouï de l’industrie métallurgique, sous l’influence des demandes croissantes des États-Unis. En ce qui touche la France, la production houillère n’a fléchi légèrement en 1870 que pour reprendre aussitôt tout son élan; elle est aujourd’hui de 17,500,000 tonnes, soit vingt fois ce qu’elle était il y a soixante ans, et, depuis la création des

  1. Annexe au procès-verbal de la séance du 22 janvier 1874, n° 2180.