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permettrait peut-être aujourd’hui d’extraire avec profit le précieux métal. De même que l’allure et la richesse des gisemens sont intimement liées avec les caractères orographiques et géologiques du sol, les conditions de l’exploitation dépendent des forces productives élémentaires : machines, chemins de fer, canaux, routes. Malgré tout ce que notre siècle a vu s’accomplir en ce genre, il y a encore plus d’une lacune à combler, plus d’un réseau à étendre ou à créer.

Les enseignemens fournis par l’histoire de nos exploitations minières, aussi bien que les résultats réunis par la statistique comparée de la production et de l’importation, conduisent à considérer séparément les mines des métaux autres que le fer, les mines de fer et les gisemens de combustibles. Des premières, malgré le nombre et la variété des gîtes épars dans les diverses régions de notre territoire, M. Caillaux a donné une description complète, quoique succincte. De cette vaste enquête se dégagent nettement quelques conclusions importantes. D’abord le moyen âge apparaît comme une période où la libre exploitation a rendu nos mines florissantes. C’est ainsi que tous les travaux poursuivis sans idées préconçues vengent cette grande époque du dédain dont nos historiens depuis Louis XIV ont voulu l’accabler. À ce seul point de vue déjà, l’histoire de nos mines serait d’un haut intérêt par la multiplicité des faits qu’elle rassemble, et qui tendent à nous faire reconnaître « qu’à partir de la trêve de Dieu et de l’institution de la paix, et malgré bien des agitations, cette période fut dans l’ensemble une époque de travail fécond, de progrès réel et de saines libertés[1]. » En second lieu, la destinée de toutes les exploitations se montre tristement uniforme : la plupart durent être abandonnées dès la fin du XIIIe siècle, en raison surtout de l’imperfection des méthodes de travail. Reprises de toutes parts à l’époque de la renaissance, elles eurent un vif éclat, grâce à l’emploi de procédés meilleurs, tels que les bocards pour broyer les minerais, la construction des galeries d’écoulement; mais, tandis que les mines de l’Allemagne et de l’Angleterre n’ont pas cessé de prospérer depuis cette époque, celles de la France, placées à partir d’Henri II sous la tutelle soit d’un grand-maître, soit d’un conseil administratif, ou soumises même parfois à un monopole exclusif, n’ont pu que végéter pour disparaître presque toutes. Malgré l’élan donné à la fin du siècle dernier par les états provinciaux à toutes les œuvres locales, l’abandon est aujourd’hui à peu près complet. Cependant, et c’est sur ce point que M. Caillaux a justement concentré tous ses efforts, plus on poursuit l’étude des gisemens, l’analyse des minerais et la comparaison de nos gîtes avec leurs analogues dans les contrées voisines, plus on reconnaît que nos richesses minérales, beaucoup

  1. Alfred Caillaux, Mémoire sur les mines métalliques de la France, Paris 1872.