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de simple police ; le juge de ces contraventions, si elles sont à la charge d’un étranger, ne pourra être qu’un magistrat étranger : exceptionnellement les nouveaux tribunaux peuvent connaître des crimes ou délits commis par ou contre leurs membres dans l’exercice de leurs fonctions ou à l’occasion de l’exécution de leurs sentences. Dans ces cas spéciaux, la chambre du conseil et le tribunal correctionnel sont composés de trois juges, dont deux étrangers et un indigène, et de quatre assesseurs étrangers, dont deux de la nationalité du prévenu. À la cour d’assises siégeront trois conseillers, deux étrangers et un indigène ; les douze jurés seront étrangers, dont moitié de la nationalité de l’inculpé ou de la nationalité que celui-ci désignera. En cas de doute sur la compétence respective de la juridiction mixte et de la juridiction consulaire, le conflit sera déféré à une commission arbitrale composée de deux magistrats désignés par le président de la cour d’appel et de deux consuls choisis par le consul intéressé. » Les codes égyptiens destinés à être appliqués par les tribunaux mixtes seront soumis à l’examen des puissances. La convention aura une durée de cinq ans pendant laquelle aucun changement ne pourra y être apporté. À l’expiration de ce délai, il sera loisible aux puissances, soit de recourir à l’ancien ordre de choses, soit d’étudier d’autres combinaisons.

Telle est, dans ses principes généraux, et sans tenir compte des points de détail et d’exécution, qui ont cependant leur importance, la constitution judiciaire que le khédive se propose de mettre en vigueur. Il suffit d’une simple lecture pour reconnaître avec quel soin les négociateurs européens ont accumulé les garanties au profit de leurs nationaux. D’après la composition des tribunaux, on croirait qu’il s’agit de créer en Égypte des cours de justice européenne plutôt que d’organiser une justice égyptienne. Cette mesure n’en a pas moins été l’objet de violentes critiques. La question est en effet des plus délicates, elle est réellement controversable, puisque les gouvernemens européens ont si longtemps hésité à la résoudre, et qu’ils ont seulement consenti à une solution provisoire. L’excès même des garanties qui ont été réclamées atteste la gravité des intérêts engagés ainsi que les scrupules des négociateurs. Il convient d’examiner les critiques auxquelles ces traités ont donné lieu et d’apprécier si elles sont de nature à prévaloir contre la réforme.


III

Il n’y a plus à discuter l’objection qui se fonde sur la violation prétendue des capitulations. Nous avons déjà expliqué comment ces anciens actes demeurent intacts au point de vue européen. Il ne s’agit que de modifier le droit coutumier de l’Égypte, et de substituer à des