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métalliques, des jaunes d’or, des rouges ardens, des bleus éclatans, des blancs aveuglans, mais de la couleur point. C’est la vieille histoire du régent, à qui les fées avaient à sa naissance fait don de toutes les qualités, excepté d’une seule : celle de savoir se servir des autres.

Dans l’Amphion, le poète assis, sa lyre à la main, préside à la construction d’un édifice dont s’élèvent déjà les premières assises. À sa voix, de petits génies taillent des blocs de marbre, que d’autres génies portent et juxtaposent. C’est défigurer le mythe. Il n’est dit nulle part qu’au son de la lyre d’Amphion des génies, maçons et tailleurs de pierre, sortissent de terre. Les pierres se plaçaient d’elles-mêmes. Au reste, ce sujet convenait-il bien au nouvel Opéra ? Ne pense-t-on pas involontairement, en regardant ce roi de Thèbes qui élevait si vite et à si peu de frais tant de beaux édifices, au moderne Amphion qui a dû mettre tant de temps et jeter tant de millions pour construire un monument d’un style fort discutable ?

Le troisième tympan est consacré à la dernière étape du voyage infernal d’Orphée. C’est à l’entrée de l’Averne. D’un gouffre bordé de grands rochers gris s’exhalent ces vapeurs sulfureuses mortelles aux oiseaux dont parle Virgile. Perché debout sur la pointe d’un rocher, Mercure contemple avec amour le caducée qu’il tient à la main. On dirait qu’il porte pour la première fois ce noble attribut. Quant à Orphée et à Eurydice confiée à sa garde, il ne s’en inquiète nullement. Un peu plus à droite et sur le même plan, Eurydice, enveloppée d’une draperie céruléenne et couronnée de blanches asphodèles, donne la main à Orphée, qui la précède, toujours sur le même plan. Orphée et Eurydice sont vus de profil. Ces trois figures, placées sur le même plan et si peu liées l’une à l’autre qu’on pourrait faire de ce panneau trois tableaux distincts, ont la composition fort simple des premiers vases étrusques, ou, si on aime mieux, de nos ombres chinoises. Le dessin sec et anguleux et les corps sans relief complètent l’illusion. Cela figurerait très bien comme transparent à la prochaine reprise d’Orphée aux Enfers. Le Mercure cependant a une jolie tête grecque, petite et reposant sur un cou court et solide. Son corps aurait un galbe élégant, s’il n’était alourdi par une trop grande abondance de muscles qui ressortent et brisent la ligne des contours. Tous les muscles agissent dans cette figure au repos ! Pour l’Orphée, il est vraiment si déplaisant qu’on félicite Eurydice de retourner aux enfers.

Avant de quitter le foyer, signalons, afin d’être complet, les deux plafonds des petits salons par M. George Clairin, et les figures en mosaïque du plafond de l’avant-foyer, exécutées d’après les cartons de M. Gurzon. M. Clairin a peint deux génies de la famille de celui