Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 7.djvu/471

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

carlisme. C’est aux conseillers du nouveau régime de ne pas compromettre cette situation privilégiée par des tentatives de réaction politique ou religieuse, de profiter d’une expérience qui a coûté assez cher. C’est par le libéralisme que la royauté d’Isabelle triomphait dans la guerre de sept ans, et toutes les fois qu’elle s’est livrée depuis aux influences absolutistes et cléricales, elle a couru les aventures. Que le nouveau gouvernement cherche à ramener une certaine paix religieuse, il le peut d’autant mieux que le clergé ne lui est point hostile, que le pape lui-même n’a jamais été favorable à la cause carliste ; mais ce serait une singulière témérité de vouloir réagir contre certaines conditions de liberté religieuse ; on ne sait pas où l’on irait, et de plus on se créerait des difficultés au dehors. C’est déjà un sujet d’ombrage en Angleterre, en Allemagne. Peu de jours avant le coup de théâtre qui l’a fait roi, le jeune prince publiait un manifeste d’inspiration fort libérale. Celui qui a le plus fait pour lui rendre la couronne et qui paraît avoir toute sa confiance, M. Canovas del Castillo, est un homme à l’esprit ouvert et libre, habile, pénétré de cette idée que la monarchie restaurée ne doit être le monopole d’aucun parti dans un pays où tout le monde a fait des révolutions. C’est là justement la libérale pensée qui doit guider cette royauté nouvelle, dont le premier acte sera sans doute de rétablir le régime constitutionnel, d’appeler des cortès à sanctionner l’œuvre qu’un soulèvement militaire et des acclamations populaires ne suffiraient pas à faire vivre.

CH. DE MAZADE.


_________


REVUE MUSICALE.
____


L’INAUGURATION DU NOUVEL OPÉRA.


Cette fois le programme n’aura point menti ; l’inauguration de la nouvelle salle aura lieu, disait-il, le 5 janvier, et, ce jour venu, les portes se sont ouvertes. Par quel redoublement d’activité, par quels efforts surhumains le travail s’est accompli, nous n’avons pas à le raconter ici. Le matin encore, vous rencontriez des gens qui vous promettaient pour le soir mille désastres de l’air du plus parfait contentement, car, s’il y a toujours dans le malheur de nos amis quelque chose qui ne nous déplaît pas, les revers de nos ennemis nous mettent en liesse, et pour les envieux tout homme qui réussit est un ennemi. Eh bien, non ! les destins avaient arrêté que cette première soirée ne tromperait pas l’attente du public, et les petites contrariétés accidentelles devaient même lui servir. Ainsi l’indisposition de Mme Nilsson, loin d’amener aucun péril, semblait venue là tout exprès pour aplanir les difficultés. On connaît les amours-propres de théâtre ; mettre en