Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 7.djvu/423

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et l’indignation publique ne connurent plus de bornes : à la bourse, deux représentans des premières maisons ne purent échapper aux violences les plus graves que par l’attitude énergique du président, le baron de Wodianer[1]. C’est à la suite de ce qu’on a nommé le Krack de Vienne que le progrès a commencé de s’arrêter dans la situation financière de l’état ; mais, avant de terminer ce qui se rapporte à cette dernière moitié de la période écoulée depuis 1867, il faut établir par quelques chiffres les avantages obtenus dans la première.

La comparaison des recettes et des dépenses telles que les comptes réglés de chaque exercice les donnent permettrait de suivre année par année les résultats obtenus. Avec l’assentiment du pouvoir législatif, le gouvernement n’a reculé devant aucun sacrifice, frappant, sans épargner même les créanciers de l’état, tous les revenus de taxes qui devaient paraître lourdes, et cependant il n’avait pas dépassé la mesure, puisque les relevés du commerce intérieur et extérieur donnent des chiffres de plus en plus forts : de 1868 à 1873, les recettes ordinaires ont monté de 529 millions à 662. En même temps les dépenses ordinaires ne variaient que de 424 à 478 millions. Le service de la dette étant défalqué, les dépenses gouvernementales proprement dites (en dehors de celles des ministères de la guerre, de la marine et des affaires étrangères, qui font partie des. dépenses communes) ne dépassaient pas 182 millions. Ce n’est certainement pas trop pour une nation de 20 millions d’âmes, et, malgré les surcharges récentes des impôts, les dépenses de l’état ne montent en Autriche qu’à 43 francs par habitant ; l’Italie en réclame à chacun plus de 57.

Une des causes les plus actives et les plus claires de la prospérité des états modernes est sans contredit le développement des voies ferrées. Nous avons eu déjà plusieurs fois l’occasion de parler des chemins de fer de l’Austro-Hongrie ; il suffira donc de rappeler qu’en 1867, dans tout l’empire, les lignes livrées à l’exploitation ne dépassaient pas 5,800 kilomètres. Dans l’annuaire publié par M. Kohn, la part de la Cisleithanie seule, en janvier 1873, était de 9,225 kilomètres, elle n’en avait que 3,716 avant l’établissement du dualisme. Dans cet ensemble, la Bohême tient le premier rang et en possède à elle seule plus du tiers, les deux provinces d’Autriche et la Galicie réunies la dépassent à peine, le pays de Salzbourg est le moins favorisé. — Le système adopté par le gouvernement pour arriver en si peu d’années à un tel résultat a

  1. La bourse de Vienne est constituée, comme le stock-exchange de Londres, en une corporation que préside avec une grande autorité l’honorable président du conseil d’administration de la Staats-Bahn.