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c’est-à-dire dans les comptes réglés pour 1872, les recettes ordinaires de l’Autriche proprement dite se sont élevées à 662 millions ; les dépenses propres avaient absorbé 478 millions et les dépenses communes 152, ensemble 630, laissant ainsi un excédant de recettes de 32 millions, auxquels il fallait ajouter près de 4 millions de recettes extraordinaires venant de la vente des domaines.

Pendant ces cinq années, on vit ainsi le déficit de 84 millions en 1868 osciller à 10 millions en 1870, à 23 millions en 1871, pour aboutir à ce résultat très significatif de 1873. Le budget arrêté pour 1875 ne se présente malheureusement pas sous les mêmes auspices, puisqu’il s’élève à 932 millions pour les recettes[1] et à 953 millions pour les dépenses, avec un déficit de 20 millions environ ; mais il faut dire que les deux dernières années ont été signalées par une crise financière très intense, dont la cause principale est l’excès de la spéculation, suite ordinaire des progrès rapides de la prospérité industrielle et commerciale. Cette crise, dont les périls ne sont pas encore conjurés, accompagnée, sur une partie au moins de l’empire, de récoltes médiocres, éclata au moment même où la capitale de l’Autriche s’ouvrait aux produits du monde entier et les conviait à une exposition universelle où l’industrie indigène a tenu la place la plus honorable.

Sans arrêter brusquement l’essor de cette prospérité et surtout, nous l’espérons bien, sans compromettre l’avenir d’une façon irrémédiable, la crise de 1873 a séparé en deux parties trop distinctes la période écoulée depuis l’établissement du dualisme pour que l’on ne fasse pas ressortir les traits distinctifs de chacune. Le paiement de nos 5 milliards à l’Allemagne a produit les conséquences les plus contraires : il semble avoir enrichi les vaincus et appauvri les vainqueurs. L’Allemagne du nord est encore en proie aujourd’hui à un grand malaise financier, l’Allemagne du sud se remet à peine de celui qu’elle a subi en 1873, et dont l’origine remonte au partage de notre rançon fait entre autres avec la Bavière et le Wurtemberg. L’argent français permit alors de rembourser la plupart des obligations contractées pour la guerre ; les fonds d’état s’élevèrent, la rente autrichienne surtout. Le capital abondant, les entreprises se

  1. La comptabilité du gouvernement autrichien se prête à une anomalie qu’il faut faire ressortir. Dans les budgets présentés au Reichsrath et votés par lui, on fait figurer le chiffre des recettes brutes y compris les frais de recouvrement. Dans les budgets réglés, ces frais ne figurent plus, et on ne voit apparaître que les recettes nettes ; de là ces différences très grandes en apparence entre les chiffres des mêmes budgets. Quand on veut étudier de près les variations des exercices successifs, il semble préférable de prendre les chiffres des recettes nettes : aussi pour appuyer nos démonstrations, préférons-nous d’ordinaire citer les articles des budgets réglés.