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vigoureuses, se manifeste tout d’abord dans l’amélioration des finances, suivie toujours bientôt d’une amélioration de la situation politique. Cette thèse peut s’appliquer à l’une des nations qui nous intéressent de plus près, dont le rôle en Europe n’a perdu, ni pour le présent ni pour l’avenir, l’importance acquise dans le passé, qui a traversé de grandes difficultés intérieures et extérieures, mais qui poursuit depuis sept ans un travail de reconstruction digne de toutes les sympathies, nous voulons parler de l’empire austro-hongrois.

Comment fonctionne dans chacune des deux parties de la monarchie l’organisation financière ? L’une des deux marche-t-elle plus vite que l’autre dans la voie du bon ordre ? Après les embarras extrêmes qu’avaient causés la guerre étrangère et les complications politiques, après la banqueroute séculaire, le mal chronique du cours forcé et des déficits annuels, comment l’Autriche-Hongrie a-t-elle reconstitué un état régulier, un budget normal ? A quel degré de prospérité enfin est-elle parvenue ? Nous essaierons de l’indiquer par l’étude comparative des budgets de l’Autriche et de ceux de la Hongrie à partir de l’année 1867, où les hommes d’état à qui incombait la tâche de relever la fortune de l’empire vaincu à Sadowa en ont trouvé le moyen dans la constitution du nouveau régime intérieur, à la fois conservateur et libéral, qu’on a nommé le dualisme.


I

On a souvent comparé l’Autriche à la salamandre qui vit dans le feu, et cette comparaison exprime bien les vicissitudes continuelles d’une puissance qui toujours se relève pour s’affaisser ensuite sans jamais succomber définitivement sous l’étreinte de l’adversité. A peine sortie des guerres soutenues par Marie-Thérèse, elle entre en lutte avec la république et l’empire français, et à partir de 1788 s’ouvre une première période d’émission de papier-monnaie qui finit par la banqueroute de 1811, suivie bientôt de celle de 1816. Un simple chiffre en résume la portée : 500 florins de papier-monnaie, après 1811, n’en valaient plus que 100, et 40 après 1816. Il fallut alors à l’Autriche trente ans de paix pour rétablir l’ordre dans les finances publiques ; la création de la Banque nationale, l’émission d’une série d’emprunts à lots, dont la forme séduisait les petits capitalistes, permirent de retirer peu à peu la monnaie de papier de la circulation et de couvrir les déficits des budgets. En 1847, la dette consolidée de l’Autriche s’élevait à 2 milliards 250 millions, la dette flottante à 246 millions de francs, et le papier-monnaie en circulation était réduit à 18 millions.