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constater l’abus et le mal. Si l’on ne veut pas une inspection purement platonique, il faut y ajouter ce que la loi appelle une action. Quelle sera cette action, et qui l’intentera, si ce n’est la justice ? Tout le monde est d’accord sur ce point ; mais quelle justice ? Sera-ce la justice ordinaire ? Cela n’est pas possible, les tribunaux proprement dits n’ayant pas une compétence suffisante dans ces sortes de matières. Ce sera donc une justice spéciale. Sera-ce celle du ministre de l’instruction publique ou d’un conseil purement universitaire ? Où serait la garantie de bonne et impartiale justice pour les cours libres ? En cherchant bien, nous n’en voyons qu’une, la juridiction des conseils académiques, et en dernier ressort de cette espèce de cour de cassation, en matière de délits scolaires, qu’on nomme le conseil supérieur de l’instruction publique. C’était la solution proposée, après de longs débats, par la commission que présidait M. Guizot. Il a été fait à ce système, par l’auteur de l’amendement qui tend à interdire la liberté des cours, des objections dont aucune ne nous a paru difficile à réfuter. On nous dit que c’est rouvrir la porte à l’arbitraire dans une loi de liberté en y introduisant l’autorisation sous une autre forme. — Rien de pareil ici, puisqu’il s’agit de conseils offrant, par leur composition même, toutes les garanties possibles d’impartialité, à tel point que ces conseils en sont devenus suspects à l’Université elle-même par la prédominance des élémens non universitaires. Est-ce que la compétence de ces conseils n’est pas déjà reconnue en ce qui concerne les autres délits scolaires commis par des professeurs des écoles de l’état ou des écoles libres ? On nous dit encore que cette garantie est illusoire, parce que l’état ne pourra étendre sa surveillance sur la multitude des cours libres ; mais pourquoi ne pourrait-il pas faire ce qu’il fait pour les établissemens et les cours d’un autre genre ? D’ailleurs quels sont les cours qu’il importe de surveiller ? Ceux qui attirent la foule. Or le bruit qui se fera autour de ces cours plus ou moins fameux ne suffit-il pas pour avertir l’autorité qui doit prévenir ou réprimer le mal ? Quant aux cours sans publicité, où quelques initiés seraient réunis pour entendre la parole d’un chef de secte ou d’école plus ou moins obscur ou ennuyeux dans son enseignement, y a-t-il là un danger plus appréciable pour la société que celui de tel on tel livre écrit pour un certain nombre d’adeptes ?

Telle serait donc, selon nous, la solution pratique la plus simple et la plus sûre de la difficulté qui préoccupe en ce moment l’assemblée et suspend la discussion de la loi sur la liberté de l’enseignement supérieur ; surveillance des cours libres par un inspecteur, professeur ou délégué quelconque de l’état ; rapport fait, en cas de délit scolaire, au ministre de l’instruction publique, renvoi du professeur délinquant au conseil académique d’abord, puis au