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jet et à laquelle il n’y avait sinon rien, du moins peu de chose à retoucher. L’Angleterre ne faisait pas mieux ; on pouvait livrer ainsi des numéros 150 à 160 pour le tissage des mousselines, et 150 à 160 pour la fabrication des tulles. Ateliers de construction et fonderie eurent alors la vogue, une vogue qui, consolidée en Alsace, franchit bientôt nos frontières, et fonda au dehors le crédit de la maison Schlumberger pour la bonne exécution des grandes machines et des pièces détachées. Elle était au nombre de celles dont l’Angleterre surveillait la marche avec une sollicitude qui s’était envenimée par l’émigration de quelques ouvriers anglais venus à la suite de M. Dixon, Anglais lui-même, et l’un des associés de la maison Risler et Dixon.

Cette maison, établie à Cernay avec une succursale à Mulhouse, joue en effet un rôle dans les premiers établissemens dont la Haute-Alsace était alors le siège. M. Dixon, qui avait été constructeur à Manchester et y avait poussé très loin ses études d’ingénieur, pouvait passer aux yeux des Anglais comme un transfuge qui, un à un, livrait à l’Alsace les secrets de ses plus redoutables concurrens. Personne plus que lui, avec sa légion venue d’outre-Manche, n’avait pu donner non-seulement la notion technique, mais le maniement, pour ainsi dire, de tout ce qui formait alors le bagage de l’industrie des cotons. Il avait apporté tous les plans nécessaires pour cela, fourni les modèles, mis la main lui-même à l’exécution. Il fut au moins l’inspirateur et l’instituteur d’une population qui se jetait un peu au hasard dans des inventions nées sur un autre sol que le sien. Son succès était notoire. Les ateliers qu’il montait étaient les mieux réussis, les instrumens qu’il livrait étaient d’un meilleur service ; il venait même d’introduire dans ses ateliers un batteur anglais qui permettait de supprimer le battage et l’épluchage à la main, si dispendieux, si lent et si malsain. Il n’y avait pas un détail auquel il ne songeât, pas de grandes machines et de pièces séparées qu’il n’exécutât. Manquait-il un détail à l’ensemble de ses exploitations, vite il l’ajoutait, fabrique de garniture de cardes, pompes à incendie, pompes de puits et d’épuisement, chaudières en fonte ou en cuivre. C’était un assortiment complet.

D’autres efforts s’ajoutaient à celui des Risler et Dixon, et de 1820 à 1825 il s’accomplit de notables progrès dans la filature du coton. Ils portèrent principalement sur les métiers en gros : un essai du métier que l’on nommait le métier continu fut abandonné comme offrant beaucoup d’inconvéniens ; on s’en tint au métier le plus simple, le mieux éprouvé, au mull-jenny, qui permettait d’obtenir la trame en cannettes et de produire tous les numéros,