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Tennou et reçut de ce chef un bon pays nommé Aa : « il a des figues et du raisin, et produit plus de vin qu’il n’a d’eau. Le miel y est en quantité, ainsi que les oliviers, les plantations et les arbres. » Voilà la terre de promission, arrosée de lait et de miel, où, plus de mille ans après, les éclaireurs de Josué cueillirent les raisins, les figues et les grenades qu’ils montrèrent aux Israélites. Un des bas-reliefs du tombeau de Noumhotep, à Beni-Hassan, nous montre les costumes et les armes de ces Sémites asiatiques à l’époque dont nous parlons, sous la douzième dynastie : ils sont armés de lances et de haches de bronze, d’arcs de grande dimension, de carquois portés au dos et de massues, vêtus de tuniques descendant jusqu’aux genoux et laissant les bras nus, ou de pagnes étroits bridant sur la hanche ; les robes des femmes tombent plus bas ; elles sont chaussées de bottines rouges, les hommes de sandales ; les étoffes bariolées aux couleurs éclatantes ont de longues franges. L’un des Asiatiques joue en marchant d’un instrument à cordes qui avait rappelé à Champollion les lyres de vieux style grec. L’art de tisser et de teindre paraît donc avoir été déjà fort avancé en dehors de l’Égypte à une époque où les villes phéniciennes n’existaient pas ou n’étaient que de simples bourgades.

Les Cananéens, peuple au teint d’un brun rouge, que les Ioniens devaient un jour pour cette raison appeler Phéniciens, avaient été précédés par les Araméens dans les grandes migrations qui, du sud au nord et de l’est à l’ouest, poussèrent les différentes familles sémitiques de la Babylonie, où elles semblent avoir séjourné de longs siècles, dans les diverses régions de la Syrie et de l’Asie-Mineure. Les Hébreux à leur tour suivirent les Cananéens dans la vallée du Jourdain, où déjà étaient parvenues des tribus de même sang. La dernière migration fut celle des Assyriens. Tous ces peuples sémitiques de l’Asie occidentale constituent un groupe nettement défini, distinct à quelques égards, notamment quant à la langue et aux idées religieuses, des Sémites de l’Arabie et de l’Ethiopie, bien qu’Araméens, Cananéens, Hébreux et Assyriens soient tous sortis du berceau de la race, l’Arabie centrale et septentrionale. Le Bas-Euphrate, la Chaldée, Babylone et les vallées fertiles de la Mésopotamie ont été la grande étape de ces peuplés. Un événement inconnu, quelque invasion étrangère sans doute, força les Cananéens établis sur les bords et dans les îles du Golfe-Persique de venir chercher une nouvelle patrie sur les côtes de la Méditerranée. Ils retrouvèrent en Syrie les Araméens ; nul doute que ces peuples, unis aux Arabes et aux tribus issues de Tharé, l’ancêtre mythique des Hébreux, n’aient envahi l’Égypte et dominé dans la vallée du Nil de 2200 à 1700 avant notre ère, c’est-à-dire pendant cinq siècles.

Si, avant cette invasion, les populations sémitiques de la Syrie