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verrières du chœur, dont quelques parties sont encore fort belles, sont malheureusement aujourd’hui dans un trop grand état de confusion pour mériter longtemps l’attention ; néanmoins il s’y rapporte un fait qui a son intérêt. C’est à Mozat que fut signé un des traités qui firent poser les armes aux états féodaux de la ligue du bien public contre Louis XI. Le roi, dont on sait le caractère aussi dévot qu’astucieux, ne pouvait manquer une si belle occasion de faire connaissance avec des reliques nouvelles ; aussi s’empressa-t-il d’adresser les plus humbles, prières à monseigneur saint Anstremoine, comme nous l’avons vu à Auxerre adresser ses adorations à monseigneur saint Edme. En souvenir de cette visite, le roi Louis XI fut représenté dans les verrières du chœur, et l’on y voit encore aujourd’hui un fragment de ce témoignage de la reconnaissance monastique. Ce fut au contraire tout autre chose que de la reconnaissance que s’attira de la part des moines de Mozat un autre Louis, bien que très pieux aussi, Louis XIII. Certains subsides réclamés par l’abbaye avaient été refusés, paraît-il, et, pour tirer vengeance de ce refus, un moine, réfecturier de l’abbaye, du nom de Richeroy, fit réparer à ses frais la crypte de l’église, et en fit murer l’entrée d’une pierre gravée de deux inscriptions, l’une latine et l’autre française. Voici cette dernière, qui est une épigramme sous forme de calembour et qui se lit encore à l’entrée du chœur :

Curieux de mon auteur, passant, arrête-toi ;
Ce n’est pas un roy riche, mais c’est un Riche-roy.


Cette épigramme, qui est à placer à côté des inscriptions des fontaines de Riom, porterait décidément à croire que l’amour des pointes fut jadis au nombre des faiblesses des beaux esprits de cette région.

Mozat a trouvé son historien dans ces dernières années, un enfant du pays, M. Gomot, dont on ne saurait assez recommander les recherches à tous ceux qui seraient curieux de connaître dans ses plus minutieux épisodes la longue existence de cette abbaye[1]. Son livre est excellent, et je ne puis lui trouver qu’un seul défaut, qui d’ailleurs est inévitablement celui de tous les bons livres historiques, c’est que l’auteur semble y plaider un peu trop la cause du sujet qu’il a choisi. Mozat, abbaye secondaire, placée sous l’autorité de Cluny, n’eut jamais d’influence sur le mouvement général des choses, et, si elle eut une importance considérable pour la province de l’Auvergne, cela tint peut-être à ce seul fait, c’est que de

  1. Histoire de l’abbaye royale de Mozat, par M. Hippolyte Gomot ; Paris, Aubry, 1872