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parlement le droit de nommer tous les employés du musée, sauf le conservateur en chef. Celui-ci est désigné par la couronne sur une liste de deux candidats présentée par ces mêmes personnages. Ce conservateur a dès lors porté le titre de bibliothécaire en chef (principal librarian), quoique ce ne soit, à proprement parler, qu’une sorte de directeur-général. Ce terme surprend au premier abord ; mais l’explication historique en est facile à trouver. La première collection qui fût devenue propriété publique était une bibliothèque, celle de Robert Cotton, et la personne à la garde de qui elle avait été confiée n’avait pu recevoir d’autre titre que celui de bibliothécaire. Maintenant encore les livres et manuscrits restaient ce qu’il y avait de plus précieux dans le musée, tel qu’il était alors composé ; on n’eut donc point l’idée de changer la désignation déjà consacrée par l’usage, et la tradition une fois établie s’est toujours maintenue.

Le premier directeur-général ou bibliothécaire en chef, pour traduire fidèlement l’expression anglaise, fut le docteur Gowin Knight, membre du Collège des médecins et physicien distingué. Sous ses ordres furent placés trois gardes ou conservateurs (keepers), l’un pour les livres imprimés, l’autre pour les manuscrits, le dernier pour l’histoire naturelle, à laquelle étaient alors rattachées les antiquités. Cette dernière catégorie, qui devait plus tard prendre une si grande importance, était alors de beaucoup la plus pauvre. Les médailles en formaient la principale richesse, un certain nombre provenaient du cabinet Cotton ; mais c’était surtout Courten et Sloane qui en avaient réuni une quantité vraiment considérable. L’inventaire de ce dernier, en 1753, accusait 32,000 pièces, plus 700 pièces gravées. Il y avait aussi des bronzes, des statuettes, des bustes d’empereurs. Ce qui manquait, c’étaient de grandes statues, chefs-d’œuvre de l’art classique. On verra comment cette lacune a été comblée plus tard, comment le Musée-Britannique est devenu l’un des sanctuaires où resplendit le mieux l’éclat du plus pur génie de la Grèce.

D’après le règlement de 1759, le musée « devait être ouvert tous les jours de la semaine, hors le samedi et le dimanche ;  » mais les mots n’avaient pas alors le même sens qu’aujourd’hui. Une pièce était réservée à quelques travailleurs personnellement connus des conservateurs, qui les autorisaient à passer leur journée dans le musée. Pour tous ceux qui n’étaient pas compris dans ce petit nombre de privilégiés, il fallait des billets ; on les demandait en s’inscrivant chez le concierge, et l’on venait voir ensuite, quelques jours après, quand on serait admis. D’ordinaire c’était dans la quinzaine ; mais, comme le règlement défendait de faire entrer plus