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chimiste, s’est improvisé praticien en métallurgie, prétendant traiter indistinctement, par une méthode inventée dans les livres, tous les minerais aurifères, quelque rebelles qu’ils fussent. Retirer de sables métallifères un culot d’or de la valeur d’une pièce de vingt francs en faisant pour 100 francs de dépenses préliminaires est presque partout possible, même avec les sables de Meudon, comme le démontra un jour l’ingénieur Sage, le fondateur de l’École des mines de Paris. Ce qu’il faut, c’est de produire avec 5 ou 10 francs la valeur d’une pièce d’or de vingt francs, et voilà ce que les vrais Californiens ne perdent jamais de vue. En outre, dans le traitement de ces sortes de minerais, il y a une perte d’or ou d’argent qu’il faut se résoudre à subir. Cette perte, qui est inhérente à toutes les opérations de ce genre, on peut la réduire au minimum par tous les perfectionnemens possibles; mais vouloir atteindre dans la pratique le rendement de la théorie, vouloir même le dépasser, comme l’entendent quelques-uns, c’est chercher la pierre philosophale.

L’attention est particulièrement concentrée aujourd’hui en Californie sur l’exploitation des placers souterrains. De nouveaux gisemens de ces graviers aurifères sont chaque jour atteints, et l’on calcule qu’il y a là des milliards d’or à extraire et une durée de plusieurs siècles réservée à ces gigantesques travaux. Qu’il faille ou non rabattre de ces calculs, où les Américains se grisent volontiers, mais dont généralement les résultats ont été jusqu’ici en leur faveur, il n’en est pas moins vrai que les capitalistes étrangers commencent de nouveau à porter leurs regards vers ces lointaines entreprises. Dernièrement des financiers de Londres avaient envoyé des ingénieurs étudier les graviers de North-Bloomfield et une série d’autres gîtes non moins importans. L’or ne se remue plus à la pelle comme aux jours fortunés de l’Eldorado. Les grosses pépites sont devenues de plus en plus rares, et l’on ne gagne plus, à laver isolément les sables, des milliers de francs dans sa jour- née. Si l’on se lève pauvre le matin, il est rare qu’on s’endorme riche le même soir. Il faut aujourd’hui extraire péniblement le métal précieux à coups de millions et non plus à l’aveuglée, mais en s’inspirant des données les plus certaines de la science. La possession de gros sacs d’écus, la connaissance des lois de la géologie, de l’hydraulique, voilà ce qu’il faut maintenant pour commencer ces sortes d’entreprises. Il est indispensable que des associations financières puissantes en prennent la direction. Au milieu de tout cela, la production totale de l’or va baissant, non pas que les compagnies exploitantes ne réalisent point de bénéfices, bien au contraire : proportionnellement au nombre des mineurs occupés,