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à celles de Montrouge, il y avait comme une immense cuvette où les eaux ont passé rapides, torrentielles, charriant peut-être sur des glaces flottantes des blocs de porphyre et de granit partis du sommet des montagnes bourguignonnes. Si l’on en pouvait douter, on n’aurait qu’à parcourir les carrières de sable et de galets aux environs de Bercy, du Champ-de-Mars et dans la plaine d’Argenteuil. A l’époque de la grande exposition de 1867, quand le Champ-de-Mars fut nivelé, on y retrouva, entre autres débris curieux arrachés aux formations géologiques que l’ancienne Seine avait labourées, des blocs granitiques venus du Morvan. Deux de ces blocs, les plus volumineux, ont été déposés au Muséum comme de véritables et authentiques témoins des premières inondations du fleuve. Sur d’autres points, des mâchoires et autres ossemens de mastodonte, de cerf géant, de bœuf primitif, d’ours des cavernes, de rhinocéros à narines cloisonnées, des défenses d’éléphans velus ou mammouths, ont été découverts. Tous ces animaux sont aujourd’hui éteints ou émigrés vers d’autres régions, comme le bœuf primitif et le cerf géant. On a même trouvé en quelques endroits des crânes et des ossemens humains fossiles, et avec eux ces armes, ces outils de silex, que l’on rencontre en tant d’autres lieux, restes de la primitive industrie de l’humanité à son aurore, qui racontent les commencemens de l’histoire du travail, mais aussi celle de la guerre. Tout cela réapparaît dans les dépôts de gravier californien, même l’homme fossile, moins authentique toutefois que celui du bassin parisien; tout cela avec l’or en plus et une coloration un peu différente des galets, qui sont généralement blancs, laiteux, tandis qu’ils ont dans l’ancien lit de la Seine une apparence ambrée, jaunâtre. Des troncs de bois pétrifiés, carbonisés, des filets cristallins, métalliques, de pyrite jaune de fer, se retrouvent dans l’une et l’autre formation, et dans celle de la Californie on rencontre des débris de schiste ardoisé, de serpentine et de porphyre vert, comme dans celle de Paris des blocs de craie, de calcaire et de granit. Certains poudingues aux galets de silex, cimentés par une argile ou un sable ferrugineux, donnent aussi une idée assez nette des amas de gravier californien. Il nous souvient d’en avoir vu dans le midi de la France, aux confins du département du Gard et de l’Ardèche, qui étaient aussi aurifères. Le Gardon et ses affluens, le Rhône lui-même, ont roulé, roulent encore de l’or, et deux ou trois orpailleurs y pratiquent toujours le lavage des sables, surtout après les grandes pluies. Cette industrie fut jadis très prospère. On rencontre à la surface du sol des tas amoncelés de galets quartzeux blancs, dont aucune tradition n’indique clairement la provenance, et que le paysan attribue aux Anglais. Ceux-ci n’ayant pas occupé cette