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paraît, a grand besoin de secours au moment où il est menacé d’une « déclaration de guerre » des républicains ! Avec une perfide habileté, M. Rouher n’oublie pas de pousser un cri qui va toujours chatouiller M. le vice-président du conseil, cri de guerre contre le radicalisme, de a ralliement de tous les hommes d’ordre.)> Bref la manifestation est au complet, aussi audacieuse, aussi peu dissimulée, aussi inconstitutionnelle que possible, déguisée tout au plus sous l’emphase déclarations conservatrices faites pour servir d’amorce. — D’un autre voilà des hommes parfaitement sensés, ralliés par raison à la république, mettant leur zèle à défendre la constitution du 25 février au lieu de la diffamer et de la discréditer, modérés d’esprit autant que Que demandent-ils ? On vient de le voir ces jours derniers encore par ces discours si complètement sages de M. Germain, de M. Bérenger : l’un et l’autre appartiennent au centre gauche. Ni M. Germain, ni M. Bérenger ne peuvent passer apparemment pour des alliés ou des complaisans des radicaux. Ils combattent au contraire le radicalisme dans ses idées, dans ses utopies, dans ses violences, dans toute sa Ni l’un ni l’autre ne réclament des choses extraordinaires. Tout ce qu’ils demandent, c’est qu’on s’en tienne résolument, sans arrière-pensée, à ce qui a été créé d’un commun accord, qu’à cette constitution du 25 février on assure une majorité constitutionnelle avec toutes les forces conservatrices et libérales de la république, et qu’enfin on gouverne la France non pas en la déconcertant, mais en s’appuyant sur cette société moderne enfantée et consacrée par la révolution de 1789.

Eh bien ! entre ces deux camps, de quel côté va se tourner M. le vice-président du conseil ? Croit-il encore possible d’accepter ou de subir le concours dangereux et perfide qu’on lui offre en décriant la constitution dont il est le gardien ? Est-ce que tout ne le conduit pas à chercher ses alliances et un appui parmi tous ces hommes sensés, libéraux, qui sont tout aussi conservateurs que lui, qui ne veulent que l’affermissement du régime à la tête duquel est placé M. le maréchal de Mac-Mahon ? C’est la question, qui va se débattre dans quelques jours. puisse conduire à une crise ministérielle si la lutte s’engage sur la électorale avant qu’une transaction nouvelle ait été essayée, ce n’est point douteux. En réalité, cette crise n’est désirable pour personne, ni pour ceux qui pousseraient l’hostilité jusque-là, ni pour M. le vice-président du conseil, qui par obstination aurait compromis les intérêts les plus sérieux, ni pour M. le président de la république, et elle est bien moins désirable encore pour le pays, qui en définitive paie toujours les frais des fautes de tout le monde.

CH. DE MAZADE.

Le directeur-gérant, C. BULOZ.