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La vie se trouve ainsi restreinte aux côtes, soit le long des fiords nombreux du nord, soit surtout dans la partie occidentale de l’île que baignent et réchauffent les eaux du gulf-stream. Aussi la température moyenne est-elle, dans la région de Reikiavik, au sud-ouest, de — 2° en hiver et de + 12°, 6 en été. Ce climat ressemble à celui des Orcades ; l’été y est moins chaud et l’hiver moins froid qu’en Norvège et au nord de la Suède ; pour certaines parties de l’île, assure-t-on, janvier est plus doux qu’il ne l’est à Milan, mars y est plus froid de 9 degrés, février est le mois le plus rigoureux de toute l’année. Le blé ne croît guère, mais la pomme de terre réussit, et les pâturages, pour un bétail nombreux et de petite taille, sont excellens. On a beaucoup discuté la question de savoir si, dans les temps anciens, l’île n’avait pas connu des espèces de plantes, et d’arbres d’une dimension supérieure à celles qu’on y rencontre aujourd’hui ; les habitans montrent comme des merveilles, en certains lieux abrités, des sorbiers de grandeur ordinaire, cinq ou six peut-être pour tout le pays. Olafsen et Paulsen, deux voyageurs du milieu du XVIIIe siècle, y ont signalé un arbre de 20 et même un de 40 pieds ; les anciens livres nationaux offrent des textes embarrassans qui paraissent mentionner des forêts, tout au moins des arbres isolés, assez nombreux cependant pour suffire, sans que cela soit signalé comme extraordinaire par les chroniqueurs, à la construction de maisons, ou bien de bateaux capables de naviguer vers les côtes de Norvège[1]. Les lignites ou lits de charbon feuilleté qu’on désigne en Islande sous le nom de surturbrandr offrent des restes de pins, de bouleaux, d’érables, d’ormeaux, d’aulnes, de vignes et même de tulipiers, avec des traces de feuilles aux dimensions considérables ; cette végétation a dû être très vigoureuse, et suscitée par un climat plus chaud que notre climat des environs de Paris ; mais la formation de tels dépôts remonte à l’époque tertiaire, et l’île ne produit plus en quelque abondance depuis des siècles qu’une espèce de bouleau nain qui ne dépasse guère une hauteur de 75 centimètres ; c’est de quoi faire des forêts pour le pays de Lilliput. Heureusement le bois flotté ne manque pas sur les côtes, et la tourbe, ainsi que les fumiers d’animaux, desséchés, servent de combustible. Du côté de l’ouest surtout, où les courans d’eaux chaudes empêchent les fiords de se fermer l’hiver par les glaces, la morue abonde, pendant qu’à l’intérieur lacs et rivières contiennent en quantité considérable le saumon et la truite. Si l’on ajoute, comme complément d’une faune exclusivement arctique, la baleine, le dauphin et le phoque, qui se

  1. Voyez en particulier la Svarfdœla Saga.