Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 11.djvu/960

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La skoupchtina, réunie dernièrement dans la petite ville de Kragujewatz, se montrait assez disposée à porter secours aux insurgés de l’Herzégovine. Le nouveau ministère, qui s’était formé sous l’influence de M. Ristitch et que le prince Milan avait dû subir, semblait favoriser les ardeurs belliqueuses de la représentation serbe. Que s’est-il passé ? Si le jeune prince Milan n’est pas encore botté et éperonné dans la skoupchtina appelée un peu brusquement à Belgrade, il a fait du moins dans l’assemblée une apparition assez originale, pour déclarer que la guerre était impossible, — après quoi il a changé son ministère. C’est un vrai coup de théâtre, qui ne s’est peut-être accompli que sous l’énergique pression des conseils pacifiques de l’Europe. Quant à la Porte Ottomane, elle vient encore une fois de publier tout un programme de réformes pour les provinces insurgées. Qu’en sera-t-il de ces réformes nouvelles qui succèdent à tant d’autres réformes promulguées aux heures de crise ? Malheureusement la Turquie n’en est pas à un embarras près. Assiégée par les influences extérieures, incessamment menacée de troubles dans ses provinces, ne sachant comment faire face à ses dépenses avec un budget plus qu’obéré, elle vient de recourir à un remède qu’on ne peut pas appeler héroïque. Est-ce une banqueroute de plus ? Toujours est-il que le gouvernement turc vient de réduire de moitié le paiement en numéraire des intérêts de la dette, sauf à capitaliser ce qu’elle ne paie pas et à lui donner la forme d’un nouveau papier fort équivoque. Évidemment les réclamations européennes vont se produire, et la Turquie se retrouvera plus que jamais dans son élément, au milieu des insurrections, des banqueroutes et des réclamations étrangères.

CH. DE MAZADE.


Le Crime et la Folie, par M. H. Maudsley (Bibliothèque internationale). Paris 1875. Germer-Baillière.

La doctrine moderne sur la folie, qui ramène les troubles de l’esprit à des lésions pathologiques des organes, ne constitue pas un mince progrès réalisé par la science sur les cruels préjugés du moyen âge, et pourtant ces idées si humaines, que partagent aujourd’hui tous les médecins, sont encore loin de produire partout leur plein effet. En Angleterre notamment, la jurisprudence s’en tient toujours à son vieux critérium de la responsabilité : le discernement du bien et du mal en ce qui touche l’acte particulier dont le coupable est accusé, et au moment où cet acte a été commis. Lorsqu’un aliéné doit répondre en justice de quelque violence criminelle, dès qu’on peut découvrir à cette action un motif ordinaire tel que la colère, la vengeance, la jalousie ou toute autre